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Les cours d'économie du forum des étudiants de Sciences Po
Néanmoins, la politique européenne de développement ne se réduit pas à la gestion sur le court terme de crises de ce type ; elle constitue, au contraire, une dimension à part entière de l’Union européenne et a été affirmée dès la création de celle-ci. Tout d’abord destinée principalement aux pays de l’ACP, elle s’est peu à peu ouverte à tous les PED, ce qui a nécessité une mutation continue des objectifs et des instruments de cette politique, notamment depuis 2000.
I – Les fondements de la politique de développement
A. Fondements historiques et juridiques de la politique de développement 1.Histoire et évolution de la politique européenne de développement La politique européenne d'aide au développement remonte au tout début de la construction européenne, avec l’association des Pays et Territoires d'Outre-Mer (PTOM) à la CEE (dès 1957), la mise en place du premier Fonds européen de développement (FED) et la Convention de Yaoundé (1963) qui associait les six États de la CEE à 17 États africains et malgache. Initialement centré sur l'Afrique francophone, ce partenariat s'est élargi, au fil des conventions, à l'ensemble de l'Afrique et à plusieurs États des Caraïbes et du Pacifique. Cet élargissement progressif, ainsi que l’adhésion du Royaume-Uni en 1973, a induit de profondes réorientations dans la politique communautaire de développement dans les années 1970 (Lomé-1 en 1975). C'est aussi à cette époque que se sont renforcés les rapports de coopération avec les pays du Maghreb et du Machrek, et que la CEE a amorcé une dynamique de partenariat en direction des zones Asie et Amérique latine (ALA). Parallèlement, la Communauté européenne s'est dotée d'autres instruments de développement - programmes régionaux pour l'Amérique latine, l'Asie, les pays méditerranéens… - et lignes budgétaires thématiques. Aujourd'hui, l'Union européenne - États membres et Communauté confondus - est de loin le premier bailleur de fonds des pays en développement, avec 55% de l'APD mondiale. Au sein de cet ensemble, l'aide communautaire représente une part croissante de l'effort européen : en 2002, le montant de l'APD gérée par la Commission européenne a atteint 6,5 milliards d'euros en engagements, soit 10% de l'APD mondiale destinée à 160 pays, territoires ou organisations dans le monde.
2.Les sources juridiques Les instruments juridiques relèvent d’une approche double. D’une part, le système conventionnel est fondé sur la conclusion d’accords internationaux (régis par l’article 310 TCE), multilatéraux (Lomé) ou bilatéraux. D’autre part, le système unilatéral s’appuie sur deux bases essentielles : l’article 133 du TCE qui régit la politique commerciale commune, et l’article 308 qui est relatif à une clause de souplesse pour engager des actions communautaires hors bases juridiques existantes, permet de développer une aide financière et technique en faveur des pays de l’ALA et les actions thématiques (aide alimentaire, humanitaire, lutte contre le SIDA). Face à l’extension géographique et matérielle de la politique communautaire de développement, il a fallu introduire un nouveau titre XVII « Coopération au développement » dans le traité sur l’Union européenne de 1992. Dans les articles 177 et 179 TCE sont définis, hors accords d’association, les objectifs économiques et politiques à la coopération au développement vis-à-vis des PED, y compris celui de respect des droits de l’homme. Malgré ces instruments, la compétence de la Communauté n’est pas exclusive, elle est complémentaire de celle des Etats membres et est coordonnée par la Commission.
B. Les instruments de la politique de développement 1. Les moyens financiers mobilisés L'aide communautaire au développement passe principalement par trois moyens, qui permettent à l’UE d’adapter ses stratégies à la situation de chaque pays bénéficiaire. - le Fonds européen de développement (FED) qui bénéficie aux 79 pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (pays ACP). Il fait l'objet d'un financement spécifique assuré par des contributions des États membres (hors budget UE) de 2 milliards d'euros en 2002 ; - les programmes géographiques en faveur des pays de la Méditerranée (MEDA), de l'Asie (Asia) et de l'Amérique latine (PVD-ALA), de l'Afrique du Sud (PERD), de certains des nouveaux États indépendants de l'ex-URSS et des Balkans (TACIS et CARDS), pour un montant total de 2,4 milliards d'euros en 2002 ; - les lignes budgétaires thématiques qui concernent le cofinancement des activités mises en oeuvre par les ONG, l'aide humanitaire gérée par l'office ECHO, l'aide alimentaire, les initiatives de promotion des droits de l'homme et de la démocratie (EIDHR), l'intégration de la dimension environnementale, etc ... pour un total de 1,5 milliards d'euros.
La solidarité européenne s'affirme également dans de nouveaux domaines qui mobilisent la communauté internationale, comme l'initiative sur la dette et la lutte contre le VIH/Sida et les maladies infectieuses. La Communauté contribue ainsi à hauteur d'un milliard d'euros financés par le FED à la mise en oeuvre de l'initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE). A l'occasion du Sommet mondial sur le développement durable (Johannesburg, août-septembre 2002), les Européens ont annoncé plusieurs initiatives, en particulier dans les domaines de l'eau et de l'énergie en faveur de l'Afrique.
2.Les nouveaux objectifs de l’aide communautaire Depuis 2000, l'aide communautaire s’efforce de se réformer. Les critiques soulignaient la lenteur de la mise en oeuvre de l'aide, la complexité des procédures, le manque de personnel qualifié, l'insuffisante coordination avec les aides des États membres,... Ces critiques dénonçaient un écart important entre les ambitions affichées et la mise en oeuvre des politiques sur le terrain. En vue de renverser ces tendances négatives, un processus de réforme de l'aide extérieure a été lancé, à la fois par le Conseil et la Commission. Premier contributeur du FED, la France a joué un rôle déterminant dans l'engagement de ces réformes.
Adoptée sous Présidence française de l'UE lors du Conseil " Développement " du 10 novembre 2000, la déclaration conjointe de la Commission et du Conseil sur la politique de développement de la Communauté a redéfini la stratégie européenne d'aide au développement dans deux directions : - la clarification des objectifs (lutte contre la pauvreté, intégration à l'économie mondiale et développement durable) ; - le recentrage des activités de la Communauté (intégration régionale, commerce et développement, transports, appui aux politiques macro-économiques et accès aux services sociaux, sécurité alimentaire, appui institutionnel dans le domaine de l'État de droit).
La réforme des instruments a été engagée en janvier 2001 avec la création de l'Office EuropeAid, chargé du suivi de l'ensemble du cycle du projet (de l'identification à l'évaluation) pour tous les programmes communautaires, à l'exception de la programmation. La mise en place d'EuropeAid s'accompagne d'une vaste déconcentration des pouvoirs vers les délégations de la Commission. Des modifications importantes ont été apportées aux systèmes de gestion financière (contrôle, responsabilisation financière) et au règlement financier général, afin notamment de simplifier les procédures. Les comités de gestion, dans lesquels les États membres sont appelés à approuver les projets les plus importants préparés par la Commission, orientent davantage leurs débats sur les aspects stratégiques de la coopération, ce qui a pour effet de raccourcir le circuit administratif des projets.
II. Les actions de coopération en matière de développement
A. La politique commerciale 1. Le système des préférences généralisées (PED) Suite à la conférence de la CNUCED (1968), la Communauté européenne a été la première à appliquer un système de préférences (SPG) en 1971. Ce système prévoit des exemptions -ou au moins des réductions- douanières aux PED sur les produits industriels finis ou semi-finis, agricoles transformés et textiles. Aucune clause de réciprocité ne s’applique à ces pays qui doivent seulement appliquer la clause de la nation la plus favorisée et ne pas pratiquer de discrimination entre les pays de la Communauté. Il s’agit de favoriser l’augmentation des recettes d’exportation des PED, de promouvoir leur industrialisation et d’accélérer leur croissance économique. D’autres procédés ont été progressivement développés : les régimes incitatifs, sur la base de clauses environnementales ou sociales, les modulations tarifaires, un mécanisme graduel favorisant les PMA. Le SPG peut être suspendu si le pays concerné ne respecte pas certaines dispositions fondamentales, notamment les droits de l’homme.
2. Les accords de partenariat économique (ACP) Un nouveau régime commercial a été mis en place par l’accord de Cotonou pour les pays de l’ACP. Sa mise en place s’étale sur une longue période transitoire : l’accord de Cotonou a été conclu pour vingt ans, mais l’aide financière est révisable tous les cinq ans. Le nouveau système est fondé sur un libre-échange, conforme au principe de réciprocité différenciée pour tenir compte de la situation économique de chaque pays concerné. Les futures relations entre la Communauté et les ACP seront encadrées par des principes de partenariat économique, en principe régionalisés. Dans la lignée des accords de Lomé, est maintenu le traitement plus favorable des PMA. Les accords de partenariat devant entrer en vigueur au 1er janvier 2008, la succession de l’accord de Cotonou aux Conventions de Lomé est un processus de création continue et en cours.
B. Les actions de coopération à caractère régional
3. Les pays ACP Les conventions de Lomé constituent les fondements de la politique communautaire de coopération au développement et ont concerné jusqu’à 79 pays ACP. La convention de Lomé IV étant arrivée à échéance en février 2000, de nouveaux accords ont été négociés à Cotonou en juin 2000. Ces accords, constituant une nouvelle étape dans le partenariat, visent à renforcer sa dimension politique, à assurer une nouvelle flexibilité et à accorder davantage de responsabilités aux Etats ACP. Entrés en vigueur le 1er avril 2003, ils se fondent sur cinq piliers : a) Le dialogue politique permanent (qui vise à prévenir les crises, afin d’éviter la suspension de la coopération en cas de non-respect des droits de l’homme et des principes démocratiques de l’Etat de droit) b) La participation de la société civile et des acteurs économiques et sociaux (information et association des organisations non gouvernementales aux projets) c) La réduction de la pauvreté (objectif central, qui assure une complémentarité entre les dimensions économiques, sociales, culturelles et institutionnelles) d) Un nouveau cadre commercial e) Une réforme de la coopération financière (rationalisation et simplification des instruments financiers et révision du système de programmation).
4. Méditerranée et Sud-Est La relation contractuelle avec les pays du Maghreb et du Machrek a tout d’abord été fondée sur des accords bilatéraux parallèles. La conférence euro-méditerranéenne de Barcelone (27-28 novembre 1995) a permis une politique de coopération plus globale. Celle-ci comporte trois volets : partenariat politique et sécurité (volonté de promouvoir une zone de paix et de stabilité dans le bassin méditerranéen), économique et financier (création de zones de libre-échange, accroissement des investissements internes et étrangers, développement durable) et partenariat dans le domaine social, culturel et humain. La coopération commerciale est basée sur les principes fondamentaux d’un libre accès au marché communautaire pour les produits industriels et d’un accès préférentiel pour les produits agricoles. Le suivi de cette déclaration est assuré par une conférence, au moins annuelle, des ministres des Affaires étrangères et par un « Comité euro-méditerranéen du processus de Barcelone ».
5. Pays d’Asie et d’Amérique Latine Depuis 1976, l’UE met en œuvre un programme d’aide financière et technique destiné aux pays en développement d’Amérique latine et d’Asie, sous la forme d’accords bilatéraux de coopération économique et commerciale (Inde (1981), Brésil (1982), Chine (1985)). Ces actions de coopération se sont longtemps concentrées sur des secteurs tels que le développement agricole, l’exploitation des ressources forestières ou les infrastructures sociales. Plus récemment, une plus grande importance a été accordée à l’appui à la coopération régionale (dialogue de San José et groupe de Rio) et grâce à la promotion des partenariats entre entreprises, une coopération économique plus large s’est mise en place.
Conclusion L’objectif de la politique de développement est donc double. Il est d’une part économique afin d’encourager un développement durable et l’élimination de la pauvreté. Mais il est aussi politique, l’idée étant de contribuer à la consolidation de la démocratie et de l’Etat de droit. Dans le domaine du financement, les engagements pris collectivement au Sommet de Monterrey (mars 2002) doivent se traduire par des engagements importants en faveur de la lutte contre la pauvreté. Cet objectif de « réduction et, à terme d’éradication de la pauvreté » est inscrit dans le projet de constitution de l’Union à l’article III-218. La Commission a en outre proposé une budgétisation du Fonds européen de développement dans le cadre de la coopération ACP-UE. Plusieurs étapes ont été franchies qui ont permis d'améliorer le fonctionnement des instruments de la politique communautaire de développement. La déconcentration des délégations de la Commission a été achevée en 2004. Des efforts demeurent nécessaires pour améliorer l'impact et la qualité de l'aide délivrée. Enfin, un renforcement de la coordination entre les objectifs de la politique communautaire et la conception et la mise en œuvre des autres politiques ayant un impact sur les PED doit être engagé.
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