LA POLITIQUE DE LA VILLE

 

 

INTRODUCTION

Jusqu’en 1975, la France connaît une période d’urbanisation massive accompagnée d’une multiplication des grands ensembles type HLM, qui engendrent des problèmes de dégradation de l’habitat et de la qualité de vie, car ces immeubles ont souvent été mal conçus et mal bâtis. Dans cette même période, la population de ces ensembles se modifie : les couches moyennes initiales sont remplacées par des couches plus populaires et par des couches défavorisées souvent d’origine immigrées. A la dégradation physique de l’habitat s’ajoute la dégradation sociale des familles qui y vivent. Dès 1976, des opérations « Habitat et Vie Sociale » sont mises en œuvre, conjointement par l’Etat et les collectivités locales, afin de remédier à ces problèmes. Ces opérations étaient ciblées sur les aménagements des espaces extérieurs, des équipements collectifs et sur l’animation sociale. Toutefois ces opérations rencontrent rapidement leurs limites à cause de leur manque de coordination, de profondeur et de vue d’ensemble. La décentralisation amorcée dans les années 1980 va redonner de l’ampleur aux HVS en définissant de nouveaux objectifs tels que la prise en compte des problèmes économiques et sociaux des habitants ainsi que de leur participation aux cotés des élus locaux à l’amélioration de leur qualité de vie quotidienne. C’est en 1981 qu’est entamée véritablement une politique de la ville structurée avec des objectifs clairs et des moyens définis. En effet, le 23 décembre 1981 une Commission Nationale de Développement Social des Quartiers est crée assistée d’une commission régionale dans chaque région et dans les villes concernées par le programme dont les objectifs sont inscrits en juin 1984 dans les contrats de plan passés pour l’exécution du IX ème plan (1984-1988).

 

I. La politique de la ville : une géographie prioritaire et un traitement       social de l’urbanisme

 

A. Une géographie prioritaire

 

La base de la politique de la ville c’est sa géographie prioritaire qui vise à définir un périmètre d’intervention précis. Les territoires prioritaires représentent 1310 quartiers regroupant 6.5 millions d’habitants, 750 zones urbaines sensibles regroupant 4.9 millions d’habitants, 416 zone de redynamisation urbaine regroupant 3.4 millions d’habitants, 44 zones franches urbaines regroupant 782 000 habitants. Ces quartiers sont principalement situés à la périphérie des grandes villes et agglomérations et dans les zones d’habitat ouvrier. Le but de la politique de la ville est ainsi d’améliorer la cadre de vie quotidienne de ces quartiers au travers de multiples opérations allant de la rénovation de l’habitat à la démolition des habitats insalubres puis leur reconstruction.

Mais la géographie prioritaire est élaborée aussi à l’aide de critères économiques : la politique de la ville favorise donc le financement de dispositifs de création d’emplois en direction des jeunes. Dans les zones franches urbaines et les zones de redynamisation urbaines, les cotisations patronales et de sécurité sociale sont supprimées afin d’attirer les entreprises. 160 Plan Locaux pour l’Insertion et l’Emploi et 351 missions locales ont été crées. En mars 1999, 175000 emplois jeunes ont été lancés ainsi que 10000 TRACE (trajectoire d’accès à l’emploi).

La politique de la ville s’attache également à assurer une meilleure couverture en matière de police et de justice en adoptant principalement une politique de prévention contre la délinquance (îlotage, campagne de sensibilisation à la toxicomanie, etc.…).

B. Un traitement social de l’urbanisme

La politique de la ville a une approche sociale de l’urbanisme, en tant que son objectif principal est de faire réintégrer dans la cité des quartiers qui subissent des situations d’exclusion à la fois sociale et économique.

Elle vise à faire respecter le principe de mixité urbaine et sociale par l’intermédiaire des procédures d’attribution  et de répartition  territoriale des logements sociaux. C’est la raison pour laquelle elle veille au respect de loi 13 juillet 1988 relative à la lutte contre les exclusions, celle du 13 juillet 1991 (Loi d’Orientation pour la Ville) ainsi que celle relative à la solidarité et au renouvellement urbain.

En ce qui concerne l’enseignement la politique de la ville a permis la création des Zones d’Education Prioritaire qui concerne un millier de collèges, une centaine de lycées et 7000 écoles.

 

 

 

II. L’histoire, les principes et les acteurs de la politique de la ville

  

A. Les étapes de la politique de la ville

Les grandes étapes de la politique de la ville depuis ces vingt dernières années révèlent une prise de conscience des inégalités sociales dans la répartition du territoire, la volonté de rénovation et mixité sociale ainsi qu’une volonté de faire intervenir le plus d’acteurs possibles.

 

1. 1982-1988 : procédure du développement social des quartiers, DSQ

C’est à la suite des rapports Schwartz, Bonnemaison et Dubedout que les programmes DSQ sont lancés. Il s’agit d’améliorer touts les aspects de la vie quotidienne des résidents d’un quartier. Les préfets de régions et les présidents des Conseils Régionaux sélectionnent les quartiers les plus défavorisés qui bénéficie d’aident co-financées par l’Etats et les régions.

Le but de la procédure est de décloisonner les quartiers en difficultés. Aujourd’hui, près de 150 sites en bénéficient contre une quinzaine initialement.

Ces contrats DSQ font parties des plans Etat-régions du IX ème Plan (1984-1988).

Parallèlement, d’autres initiatives sont réalisées telles que la création d’une Délégation à l’insertion professionnelles des jeunes en difficulté (DIJ), celle des Zones d’Education Prioritaires en 1981 et des Conseils communaux et départementaux de prévention de la délinquance (CCPD et CDPD).

Un Fonds Social Urbain est crée, qui vise à favoriser l’obtention de crédits pour des projets de développement social urbain donnant lieu à un engagement de l’Etat.

2. 1988-1991 : institutionnalisation de la politique de la ville

- En 1988, sont crées au niveau national un conseil national des villes, un Comité interministériel des villes et une Délégation interministérielle à la ville chargée d’animer la politique de la ville.

- En 1990, le premier ministre chargé de la ville est Michel Delebarre. 13 sous-préfets chargés de la ville sont également nommés.

- En avril 1991 une loi sur la solidarité financière instituant des mécanismes de redistribution au profit des communes pauvres est adoptée. Cela permet la création de la dotation de solidarité urbaine versée par les communes riches aux communes plus pauvres ou qui ont à leur charge un parc HLM important.

En juillet, la loi d’orientation pour la ville (LOV) est adoptée. Le but que vise cette loi est d’instaurer un droit pour la ville, afin de faire respecter le principe de mixité sociale.

3. 1989-1993 : les contrats de ville expérimentaux

Ces contrats sont au nombre de treize ; parallèlement, 296 contrats DSQ sont lancés. On observe un décentrage de la politique de la ville au profit de l’échelle de l’agglomération, mais cela se heurte aux réticences des communes, ce qui amène en 1991 à un recentrage au profit des quartiers avec la création des Grands Projets Urbains qui sont en fait des programmes de restructuration lourde pour des quartiers très dégradés. L’Etat participe à hauteur de 2 milliards de francs jusqu’en 1999.

En 1991, la priorité est donnée à l’insertion par l’économie suite aux rapports Praderie et Aubry avec la création des plans locaux d’insertion par l’économie (PLIE) vis-à-vis des chômeurs de longue durée.

4. 1994-1998 : recentrage vers les quartiers

En 1993, les contrats DSQ sont abandonnés au profit des contrats de ville qui sont un « acte d’engagement exceptionnel par lequel une ou plusieurs collectivités locales et l’Etat décident de mettre en œuvre conjointement un programme pluriannuel de développement social et urbain destiné à traiter les quartiers les plus défavorisés à l’échelle de l’agglomération ou de la commune ».

Ces contrats de villes sont le volet urbain et social des contrats de plan Etat-région.

En 1994, un Fonds interministériel à la ville est crée, deux ans avant le lancement du Pacte de relance pour la ville (PRV) par la loi du 14 novembre 1996. ce pacte redéfinie une géographie prioritaire avec trois zones distinctes :

- 731 ZUS, zones urbaines sensibles

- 350 ZRU, zones de redynamisation urbaine (essentiellement d’ordre économique)

- 44 ZFU, zones franches urbaines (quartiers dégradés de plus de 10 000 habitants bénéficiant d’exonérations fiscales).

 Sont également crées des « emplois ville » sur le mode des emplois jeunes.

5. 1998-2000 : retour à l’agglomération

- En 1998, la loi Voynet d’orientation sur l’aménagement durable du territoire précise que les contrats de ville seront intégrés aux contrats d’agglomération.

- La loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale approfondie les lois précédentes en la matière.

- Le principe de mixité social de la LOV est repris par le projet de loi pour la solidarité et le renouvellement urbain, qui oblige les grandes communes à disposer d’au moins 20% de logement sociaux sur leur territoire.

 

B. Les principes et les acteurs

 

1. de la politique de la ville

Cinq grands principes guident l’élaboration de la politique de la ville :

 

a) Principe de proximité

La politique de la ville cherche à élaborer une géographie prioritaire en prenant en compte les difficultés que rencontrent les résidents de quartiers ou de communes clairement définis. Le but est d’améliorer la qualité de la vie quotidienne dans ces endroits en s’adaptant aux conditions sociaux économiques en présence. Ce principe rompt également avec celui de l’égalité parfaite entre les mesures et les ressources mise à disposition : c’est aussi un principe de discrimination positive.

b) Principe de globalité

La politique de la ville est une politique globale dans le sens où elle fait intervenir un nombre important d’acteurs qui doivent travailler ensemble de manière coordonnée (Etat, mairies, offices HLM, sous-préfets à la ville…)

c) Principe du contrat

Les différentes parties en présence coopèrent.

d) Principe d’association

Dans la mesure où la politique de la vile se veut surtout une politique de proximité, elle associe les habitants des quartiers concernés en favorisant notamment le développement de la vie associative.

e) Principe de collaboration interministérielle

Le ministère de la ville coordonne de multiples actions gouvernementales avec l’aide des ministères de l’éducation nationale, de l’intérieur…

 

 

 

 

CONCLUSION

La politique de la ville est en fin de compte une préoccupation récente en France, qui n’a pris son essor et ne s’est institutionnalisée et contractualisée qu’avec la relance de la décentralisation amorcée au début des années 1980. Elle révèle que sur le territoire inégalités urbaines et inégalités socio-économiques se recoupent. Son objectif principal est ainsi de réhabiliter des quartiers définis par leur degré d’exclusion afin qu’ils réintègrent le tissu socio-économique urbain habituel.

La politique de la ville a deux originalités : d’une part, elle privilégie l’action locale en associant les habitants des zones dégradées et leurs élus locaux. Mais d’autre part elle se veut globale car elle fait intervenir un nombre considérable d’acteurs (de l’Etat aux habitants) qui doivent collaborer de façon étroite.

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