La convention européenne préalable au traité instituant une (feu) Constitution pour l'Europe
« Cinquante ans après sa naissance, l’Union aborde un
carrefour, un moment charnière de son existence.L’unification de l’Europe est
imminente.L’Union est sur le point de s’ouvrir à plus de dix nouveaux Etats et à
tourner ainsi définitivement une des pages les plus sombres de l’histoire
européenne, celle de la seconde guerre mondiale et du partage officiel de
l’Europe qui a suivi.Il va sans dire que cette véritable mutation demande une
autre approche que celle qui a été suivie il y a cinquante ans. »
« Pour assurer la préparation aussi large que transparente
que possible de la prochaine conférence intergouvernementale, le Conseil
européen a décidé de convoquer une convention rassemblant les principales
parties prenantes du débat sur l’avenir de l’Union. Compte tenu de ce qui
précède, cette Convention aura pour tache d’examiner les questions essentielles
que soulève le développement futur de l’Union et de rechercher les différentes
réponses possibles. » (Déclaration de Laeken sur l’avenir de l’Union européenne)
Quel est le fonctionnement de la Convention européenne,
quels sont ses objectifs ?
Quels sont les résultats obtenus alors que la Convention
est à mi-parcours ?
Quels sont les points essentiels qui restent à débattre ?
I) Pourquoi ? Qui ?
Comment ?
1) Pourquoi une Convention Européenne?
Afin de préparer les réformes de l’Europe avant le prochain
élargissement, le Conseil européen de Laeken de décembre 2001 a décidé de
convoquer une Convention européenne.
Celle-ci a pour tache d’examiner les questions essentielles
posées par le développement futur de l’Union :
-Quelles sont les attentes des citoyens européens ?
-Comment répartir les compétences entre l’Union européenne
et ses états membres ?
-Comment simplifier les traités existants ?
-Comment renforcer l’efficacité et la légitimité de l’Union
européenne ?
Etablie sur le modèle de la Convention qui a rédigé la
Charte des droits fondamentaux de l’Union, elle devra soumettre un projet de
révision des traités en vue de la prochaine Conférence intergouvernementale de
2004.
Le Parlement européen souhaite lui que ce projet prenne la
forme d’une Constitution européenne qui pourrait être approuvée par référendum
par l’ensemble des peuples de l’Union.
2) Qui sont les conventionnels ?
Mr Valéry Giscard d’Estaing a été nommé président de la
Convention. L’ Italien Giuliano Amato et le belge Jean Luc Dehaene sont les
vice-présidents.
La Convention compte 105 membres, elle est composée de15
représentants de chefs d’etats ou de gouvernements des Etats membres, de 30
membres des parlements nationaux (2 par Etat membre), de 16 membres du
parlement européen et de deux représentants de la Commission.Les pays candidats
à l’adhésion participent à part entière aux travaux de la Convention.Ils sont
représentés de la même façon que les Etats membres actuels et participent aux
délibérations sans toutefois pouvoir empêcher le consensus qui se dégagerait
entre les Etats membres.
Le Présidium de la Convention est composé du Président de
la Convention, des deux vice-présidents et de neuf membres issus de la
Convention (les représentants de tous les gouvernements qui pendant la
Convention exercent la Présidence du Conseil, deux représentants des parlements
nationaux, deux représentants des membres du Parlement européen et deux
représentants de la Commission).
La Convention a tenu sa première session de travail en
février 2002 et achèvera ses travaux en Juin 2003. Les chefs d’état et de
gouvernement se prononceront sur le projet de révision des traités en 2004.
3) Comment travaillent-ils ?
La Convention européenne se réunit dans les locaux du
Parlement européen à Bruxelles, une à deux fois par mois. Les débats et les
documents sont publics.Pour préparer les délibérations, dix groupes de travail
ont été créés au sein de la Convention.
Les résultats significatifs obtenus viennent d’après les
Conventionnels de la méthode choisie : celle de la recherche du consensus,
c'est-à-dire de l’accord du plus grand nombre, sans se laisser bloquer par la
règle de l’unanimité.Ce point est très important car les travaux de la
convention seront prolongés par ceux de la Conférence intergouvernementale,
chargée d’approuver la Constitution.Or celle –ci retrouvera la règle de
l’unanimité. C’est pour cela que les conventionnels s’efforcent d’aboutir à des
solutions les plus « achevées » possibles.
Le Parlement souhaite que la Convention propose un projet
de Constitution européenne.Il demande que la Charte des droits fondamentaux
proclamée à Nice en 2000 constitue le premier chapitre de cette constitution.
Les valeurs de l’UE, les objectifs et les moyens, ainsi que le rôle et les
responsabilités de ses institutions y seraient également définis.
II.
Les résultats obtenus à mi parcours
1. La subsidiarité
Proposer un contrôle politique de la subsidiarité, cad
donner la garantie que l’UE n’interviendra plus au-delà de ce qui est nécessaire
pour exercer ses compétences, à la place des états membres et des collectivités
locales.Ce principe de fonctionnement de l’Union européenne est accepté par tous
et figurera dans la Constitution proposée.Dans l’avant projet réalisé par la
Convention le 28 Octobre 2002, le Titre 3 de la première partie s’intitule
« Compétences et actions de l’UE ».La Convention réaffirme les principes
fondamentaux : attribution , subsidiarité , proportionnalité.
2. Simplification des Traités
Au lieu de quatre traités difficilement lisibles, et
compliqués de nombreux protocoles, un seul traité constitutionnel –la
Constitution européenne- avec un petit nombre de protocoles annexes.
De même alors qu’il existe aujourd’hui dix catégories
d’instruments différentes pour prendre et appliquer les décisions, ce nombre
serait ramené à 5 , correspondant à des notions avec lesquelles l’opinion
publique est familiarisée : lois européennes, applicables dans toute l’Union.,
lois-cadres européennes qui doivent être transcrites dans les législations
nationales ; textes d’application ; simple avis ; et enfin décisions
individuelles, lorsque l’Union est chargée d’appliquer directement ses
compétences , par exemple en matière de concurrence. Valéry Giscard d’Estaing
souligne que ceci permettra de savoir enfin « qui fait quoi en Europe ».
3. Ebauche de la Constitution
VGE dans Le Monde du 14 Janvier : » Ce doit être un texte
rigoureux, entraînant, créatif, ou apparaissent à la fois la volonté de répondre
à des attentes fortes, et le désir de mettre en place une architecture qui
résistera au temps, en protégeant les faibles et en facilitant les avancées
vigoureuses du progrès. Le lyrisme de la Constitution c’est en quelque sorte la
calligraphie de l’Histoire ! ».
Le Praesidium doit présenter les premiers articles du
projet à la Convention à la fin du mois de Janvier.Celle –ci les discutera de
manière approfondie, avant que le Praesidium n’en établisse la proposition
finale.
Cette proposition doit débuter par les articles concernant
les principes et les valeurs de l’Union (notions essentielles pour établir les
fondements de l’identité européenne) ; puis par l’article de
constitutionnalisation de la Charte des Droits Fondamentaux.
Ensuite viendront les articles sur les compétences de
l’Union, et leur exercice.Et ainsi de suite jusqu’à la deuxième partie du projet
qui devrait décrire las politiques de l’Union.
Les conventionnels ont travaillé sur de nombreux
points pour réfléchir à cette Constitution. La Convention s’est penchée sur des
problèmes d’actualité : la lutte contre la criminalité internationale et les
trafics organisés par exemple.La Convention proposera d’inscrire dans la
Constitution une définition de la criminalité grave et transfrontalière.Cela
permettra d’élaborer une législation pénale communautaire, applicable à ce type
de crimes.Elle sera normalement plus efficace que les législations nationales
existantes , dont les réseaux criminels savent utiliser les divergences et les
lacune.
III. Les « sujets sur
lesquels la Convention doit encore progresser » VGE
1. La gouvernance économique et sociale de l’Europe
Un point fait déjà l’unanimité : la compétence monétaire
est une compétence de l’Union, les compétences économiques restent celles des
Etats membres.Selon VGE il faut encore considérer les mécanismes de
coordination et de surveillance indispensables pour assurer une cohérence élevée
entre l’exercice par l’Union de ses compétences monétaires, et celles des
politiques économiques des Etats membres.
Pour l’instant, sans qu’il y ait unanimité sur les
recommandations, le Groupe de travail tend à proposer des dispositions sur les
grandes orientations de politiques économiques, le pacte de stabilité, la
méthode ouverte de coordination, la fiscalité.Le groupe propose également le
maintien de l’Euro group et l’amélioration de la représentation internationale
de l’euro zone.
2. La réflexion sur les Institutions de l’UE.
Quelles sont les modifications qu’impose l’effet du nombre,
c'est-à-dire le passage de 6 à 25 des membres de l’UE ?
Faut-il ou non remettre en cause l’architecture initiale
choisie par les pères fondateurs, et qui repose sur les trois institutions : le
Parlement, le Conseil et la Commission, pour faire face aux nouvelles taches que
l’Union souhaite accomplir ?
Les conventionnels n’ont pas encore abouti à des réponses,
mais VGE nous donne quelques éclairages sur les préalables de ce débat. (Le
Monde 14 Janvier 2003) :
L’effet de nombre affecte les trois institutions.Le Conseil
européen qui passera de 19 membres en 1975, à 32 aujourd’hui, et à 52 après
l’élargissement en cours (les présidents des Etats et leur ministre des affaires
étrangères, auxquels s’ajoutent deux membres de la Commission).
Le Parlement européen qui dépassera le plafond qu’il
s’était fixé lui même de 700 membres, et qui deviendra ainsi la plus grande
assemblée dans le monde occidental.
La Commission dont le nombre initiale était de neuf
membres, qui est de 20 membres aujourd’hui , dont 10 désignés par les « cinq
Etats les plus peuplés »et 10 par les Etats « les moins peuplés ».Elle passera
désormais à 25 Commissaires, dont six désignés par les Etats les plus peuplés et
19 par les Etats les moins peuplés.Ce passage à 25 sera du à la désignation par
les nouveaux Etats membres de 10 nouveaux commissaires, partiellement compensé
par ma suppression du 2ème commissaire de l’Allemagne , de la France
, de la Grande-Bretagne , de l’Italie, de l’Espagne).
Pour chacune de ces institutions se pose le problème de
savoir si elle sera en état de délibérer utilement en aboutissant à des
conclusions précises et rapides.
La rotation semestrielle de la présidence du Conseil par
exemple, lorsque l’Union passera à 25 membres fragilisera le fonctionnement des
institutions en introduisant des priorités semestrielles et en empêchant la
continuité et le suivi des décisions.
Jusqu’à maintenant, la seule institution à avoir élaboré
des propositions sur le sujet est le Parlement européen.
L’autre question porte donc sur la structure
institutionnelle de l’Union.Faut-il la conserver, l’améliorer ou la modifier ?
Le système actuel a bien résisté à l’épreuve du temps, VGE et les conventionnels
pensent en général qu’il faut conserver cette architecture, mais il faut la
compléter par un dispositif amélioré de coopération entre les trois
institutions. »Une judicieuse répartition des pouvoirs, verticale grâce à la
subsidiarité, et horizontale sous la forme d’une coopération intense et
organisée entre les trois institutions, fournirait un cadre solide, original et
certainement mieux adapté aux taches à venir de l’Union. »
3. La politique étrangère de l’UE.
Celle-ci n’existe pas encore. Il existe des « actions de
politique étrangère commune mais pas de diplomatie commune sur la scène
internationale.D’après VGE cette carence s’explique par l’absence de
détermination politique à vouloir faire entrer progressivement la compétence
diplomatique des Etats dans le champs de leur action commune, et de réduire la
part des initiatives nationales. Selon VGE, la promotion du haut représentant
au rang de ministre de ministre des affaires étrangères de l’UE, et le fait de
lui confier la présidence permanente du conseil des ministres des affaires
étrangères, serait un moyen d’engager la convergence nécessaire des actions
diplomatiques des Etats européens.Il resterait à assurer la coordination entre
ce dispositif et les actions internationales, qui relèvent des compétences de
l’Union.
Une réflexion sur la structure institutionnelle de l’UE a
beaucoup à gagner à s’interroger sur la nature et les objectifs politiques de l’UE.Selon
VGE, la confusion qui entoure les débats sur la répartition des pouvoirs se
dissiperait au fur et à mesure que s’affirmerait la double légitimité de
l’Union- union des peuples et union des états.
La presse n’est pas particulièrement prolixe sur le sujet.
La plupart des articles rappellent le fonctionnement de la Convention et les
grandes lignes du projet .Très peu d’articles s’attachent à présenter les
propositions de Constitution effectuées par les conventionnels. Pour cela, il
est nécessaire de se reporter au site de la Convention qui propose des synthèses
des avancées des différents groupes de travail.