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Les cours de relations internationales du forum des étudiants de Sciences Po
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Une mine antipersonnel (MAP) est, selon le droit international, une mine conçue pour exploser du fait de la présence, de la proximité ou du contact d’une personne et destinée à mettre hors de combat, blesser ou tuer une ou plusieurs personnes »[1]. Leur impact indiscriminé et prolongé font des MAP de redoutables armes de « destruction massive à retardement » : |
depuis 2001, on estime entre 15 000 et 20 000 le nombre de victimes par an. Ces armes conventionnelles ont, depuis quelques décennies, débordé leur cadre d’utilisation classique pour être employées à grande échelle et par des acteurs non institutionnels dans les conflits internes. Leur prolifération est d’autant plus aisée que les MAP sont des armes légères, peu coûteuses et en général faciles à fabriquer ; il resterait encore dans le monde entre 60 et 110 millions de mines dissimulées. Dès le début des années 1990, la sensibilité de l’opinion internationale au problème posé par les MAP, a suscité le lancement d’un processus d’interdiction de ces mines dont le traité d’Ottawa de 1997 constitue l’aboutissement.
I- Vers l'interdiction des MAP : de la maîtrise de l'armement au droit humanitaire international
A) Un problème humanitaire et socio-économique d’envergure planétaire
Apparues lors de la IGM, les MAP étaient traditionnellement utilisées dans le but de limiter les mouvements des combattants ou de protéger des sites sensibles. Or, en même temps que les conflits internationaux ont cédé la place à des conflits internes, ces mines ont vu leur emploi sensiblement évoluer : depuis la guerre froide, les mines sont utilisées à grande échelle (entre 1980 et 1995, 190 millions de MAP auraient été produites); les technologies de mines se sont diversifiées et certains modèles (cas des mines « intelligentes ») sont conçus pour être largués en quantité massive. Environ 80 pays seraient ainsi infectés par ce fléau, les zones les plus touchées étant l’Afrique et l’Asie (+ de 70% du total des mines), suivies du Proche Orient et de l’Europe. Les MAP visent désormais à contrôler les populations par la terreur : frappant indistinctement combattants et non combattants, elles auraient fait, depuis 1975, plus d’1 million de victimes dont une écrasante majorité de civils. Ces mines sont également un moyen de désorganiser un territoire : une fois déployées, les mines peuvent rester actives pendant des décennies et constituent, à cet égard, un obstacle durable au développement du pays.
B) Une réglementation progressive de l’emploi des mines antipersonnel
La réglementation de l’emploi des MAP s’inscrit dans la continuation du droit coutumier des conflits armés qui s’est précisé depuis la 2nde moitié du 19ème siècle et qui pose plusieurs principes généraux : distinction entre soldats ennemis et populations civiles, limitation dans le choix des armes, etc....
En 1980, une première convention internationale est venue encadrer le recours aux MAP: la Convention des Nations Unies sur certaines armes classiques (CAC) dont le protocole II, portant sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi des mines, pièges et autres dispositifs, restreint l’emploi des mines. Cette convention ne s’appliquant à l’origine qu’aux conflits internationaux, le protocole II a fait l’objet, en 1996, d’un amendement afin qu'il s'applique également aux conflits internes ainsi qu'aux acteurs non institutionnels (miliciens, par ex.). Malgré cette avancée, la convention, ratifiée par 55 Etats seulement, reste un traité-cadre qui ne prévoit notamment aucun mécanisme de surveillance.
Parallèlement à la négociation internationale, plusieurs Etats ont décrété, au début des années 1990, des moratoires sur leurs exportations (Etats-Unis en 1992, France en 1993, action commune de l'UE en 1995) et sur leur production (Belgique et France en 1995) de mines antipersonnel.
C) Le processus d’Ottawa
Un tournant s’opère au début des années 1990, lorsque la crise humanitaire liée à la prolifération des MAP reçoit l’attention de la communauté internationale: le Comité International de la Croix-Rouge (CICR) et les ONG ont largement contribué à cette mobilisation de l’opinion internationale (lancement en 1992 de la Campagne internationale pour l'interdiction des mines terrestres). Afin de contourner l'approche traditionnelle des négociations internationales (centrée sur les problèmes de sécurité et de désarmement) et asseoir la question des MAP sur le droit humanitaire international, il fallait sortir du cadre multilatéral classique: c'est ce qu'a fait une coalition de puissances moyennes (Canada en tête), en lançant le processus d'Ottawa:
- oct. 1996 : conférence internationale d’Ottawa (déclaration et plan d’action)
- juin 1997 : conférence de Bruxelles (proposition du projet de traité d'interdiction)
- sept. 1997: conférence d'Oslo (négociation officielle du traité)
- 3-4 déc. 1997 : conférence d'Ottawa (signature du traité par 122 Etats)
II La Convention d'Ottawa: des progrès certains malgré des difficultés d'application
A) L'interdiction totale des mines antipersonnel
La convention d'Ottawa se distingue des traités antérieurs en ce qu'elle vise l'interdiction d'une classe entière d'armes largement utilisées. Entrée en vigueur en mars 1999, elle fait référence au "principe du droit international humanitaire" et bannit l'emploi, la production, le stockage et le transfert des mines antipersonnel (art.1). Elle ordonne aux Etats parties la destruction de leurs stocks de MAP dans un délai de 4 ans (art.4) et le nettoyage des zones minées dans un délai de 10 ans (art.5). Autre fait sans précédent dans l'histoire des traités de désarmement: la convention d'Ottawa impose aux Etats parties un devoir d'assistance à l'égard des victimes de MAP et des pays concernés par ce problème, ainsi qu'un devoir de coopération internationale aux opérations de déminage et à la destruction des stocks de mines. Contre les Etats parties éventuellement suspectés de la violer, la convention prévoit des mécanismes de contrôle (envoi sur le terrain de missions d'experts).
B) Des progrès indéniables réalisés en matière de lutte contre les MAP
Depuis 1997, un nombre croissant de pays a rejoint la convention d’Ottawa: (132 Etats parties et 140 ratifications). Le recours aux mines a reculé et leur commerce a quasiment cessé. La production de mines elle-même a nettement baissé : une cinquantaine de pays y ont mis un terme, dont 8 des 12 plus gros producteurs[2] exportateurs de mines des trois dernières décennies (dont la France, l’Italie et la RU). Les Etats-Unis eux-mêmes, bien qu’en marge du traité d’interdiction, n'ont pas fabriqué de mines antipersonnel depuis 1997. Enfin, les stocks de MAP ont diminué (- 52 millions). Ces progrès se retrouvent ainsi dans la baisse significative du nombre de victimes de mines recensées chaque année : selon le CICR, le nombre de blessés a reculé de plus de 65% dans des pays tels que la Bosnie-Herzégovine, le Cambodge et la Croatie. Au Mozambique, un des pays les plus touchés au monde par les MAP, le nombre de victimes serait passé de 55 à 7 par mois entre 1995 et 1998.
C) Un traité néanmoins encore peu contraignant et comportant plusieurs lacunes
Toutefois, les mécanismes de transparence et de vérification associés à la convention demeurent rudimentaires. Bien qu’en principe intégrée au droit interne, la violation de la convention par des acteurs non institutionnels n’est pas systématiquement sanctionnée par les Etats. D’autre part, des pays importants restent en marge du processus : parmi ces derniers, 3 des 5 membres du Conseil de sécurité de l’ONU (Chine, Russie et Etats-Unis). Par ailleurs, l’effort financier fourni par les Etats partie à la convention reste bien en deçà des ambitions de la convention. Or, les opérations de déminage sont particulièrement coûteuses (entre 300 et 3 000 USD pour retirer une mine qui coûte entre 3 et 30 USD); la neutralisation programmée des mines demeure dans ces conditions inaccessible aux pays du tiers-monde.
La lutte contre les MAP a consacré un mode innovant de négociation internationale (hors du cadre multilatéral classique et avec la participation directe des ONG aux négociations). Si le processus d'Ottawa, dont la première conférence d'examen se tiendra en 2004, marque une avancée décisive en matière de désarmement et de développement du droit humanitaire international, l'objectif d'éradication totale des mines et de leurs effets reste encore loin d'être atteint: des Etats non parties au traité, comme la Chine, l'Inde ou la Russie, continuent d'utiliser ces armes. En outre, restent des questions laissées en suspens par le traité, dont celle des autres armes à "effet antipersonnel" (mines antichars, bombes à fragmentation utilisées par les Etats-Unis en Afghanistan etc…).