Je reprends le texte de Paul pour confirmer la fin : il y a effectivement qqchose de pourri au royaume doctoral.
Paul a écrit:Petit avertissement le problème de faire de la recherche à l'IEP est assez simple : Jusqu'a la thèse ça va mais après ?
Après, 40% des thésards se retrouvent dans le privé. C'était l'objet d'une communication récente dans le journal du CNRS : on ne forme pas les thésards à ce qu'ils vont réellement devenir pour quasi la moitié d'entre eux (le 40% n'est pas très solide, le traçage est mauvais... surtout dans le privé justement).
L'Association Bernard Gregory tente de suivre les post-doc, un peu à la manière du Chronicle of Higher Educ. outre-Atlantique. La Maison de l'Entreprise apprend aussi à recycler le post-doc, ce grand type maigre qui sait plein de trucs sur un sujet tête d'épingle mais qui ne saurait pas rapiécer son pantalon, en boîte privée.
Malgré tout ça le taux de chômage, qui descend jusqu'à bac+3, remonte ensuite et pour les doc/post-doc c'est pas la gloire. Du coup Godet, un enseignant au CNAM, concluait dans le supplément Les Echos Orientation d'il y a qq semaines que c'était handicapant de trop pousser ses études, et que c'était une sale habitude structurelle française à perdre. Je ne sais pas trop qu'en penser.
Il n'y a naturellement pas assez de place dans les instituts de recherche des IEP pour les thésards qu'ils forment . Les places d'enseignants des IEP ne sont pas remplies par les les thésards formés dans les écoles doctorales des IEP.
Vrai et faux. Vrai il n'y a pas de place pour tout le monde. Faux les IEPs accueillent effectivement leurs thésards, surtout ceux qui négligent la thèse un ou deux ans pour leur poste d'ATER. En réalité ça s'étend même plus largement aux grandes écoles : on retrouve des doctorants EHESS enseignant un peu partout, la viscosité et le localisme aidant ça se transforme en poste au bout d'un moment.
Localisme justement :
la fac préfère généralement ses propres thésards (et vive les emmerdes pour avoir son habilitation auprès du CNU si vous voulez enseigner en fac sans être universitaire pu jus)
C'est même un fait avéré en science politique. Cherchez l'article d'Olivier Godechot sur les jurys de thèse en science politique (paru dans la revue Palaestra, dispo sur son site Free) : les jurys locaux accordent 10% de mentions en plus.
On peut dire qu'en France, on est encouragé (je le suis 5 jours/7) à théser dans son environnement d'origine, avec des gens du coin, voire sur des sujets du coin et ensuite à publier dans des revues du coin. Aux USA la logique est totalement diférente : à chaque grand étape (Master, PhD, post-doc) il faut aller faire ses preuves ailleurs, se réadapter, prouver sa mobilité et son caméléonisme (un peu l'équivalent du séjour à l'étranger chez nous), se confronter à d'autres écoles de pensée. Végéter sur place est mal vu.
Evidemment, j'ai un biais immense en faveur de la méthode US, même si je vais effectuer 5.5 années sur 6 à Grenoble.
Quand aux places en Institut de recherche (INSERM INRA CNRS) elles sont chères et supposent le plus souvent un peu de post-doc.
Ca mérite du détail. Le suivi des post-doc par l'Educ Nat (ANTARES) est pas terrible. Qq instituts tirent quand même leur épingle du jeu : INRA et CEMAGREF entre autres, INRIA aussi. INSERM : places chères mais hyper-convoitées. Aucun de ces instituts n'est intéressé par notre profil (j'attends le démenti de pied ferme, j'ai tout tenté moi-même).
CNRS département SHS : trop nombreux, mais heureusement après la période de vache maigre il y a aura un appel d'air qd les baby boomers partiront à la retraite. Dans les couloirs, on parle d'un premier effet vers 2006/7. En 2008/9 ce sera certain.
A lire : la valorisation en SHS dans la lettre d'info du dept SHS du CNRS, mois dernier. Contient une liste des domaaines en vogue (politiques des territoires, des risques, des usages, etc.). Il faudrait surtt une liste des trucs morts à ne pas faire : anthropo (en revanche le peu qui se fait est génial ET récupéré par le privé, chercher dans le blog de F. Pisani du Monde), histoires diverses, théorie politique, etc.
IL faut donc essayer de se trouver un DEA dirigé par / maître de thèse dirigé par quelqu'un qui pourra réellement vous aider au moins quelques années pour esssayer de publier après la thèse, avec une vraie influence dans sa matière (genre Keppel par exemple qulqu'un avec un vrai réseau) si vous voulez rester dans le milieu de la recherche. Sinon il y a 9 chances sur 10 pour que le milieu de la recherche ne veuille plus de vous après votre thèse.
C'était la conclu d'un article du Chronicle, qui citait par exemple Stephen Jay Gould comme un directeur génial, qui appelait ses anciens élèves toute la nuit pour obtenir des postes à ses doctorants. L'immense hypocrisie actuelle est celle qui consiste à dire que toutes les thèses se valent, que tous les directeurs se valent, que tous les diplômes se valent. Je pondrais bien un § pour ridiculiser cette jolie connerie égalitariste, mais ce serait prêcher aux convertis.
P.S. la revue en ligne Espaces Temps a qq bons articles sur les thèses et tout ça.
"Des quelques 100 millions d'hommes que compte la population de la Russie soviétique, il nous faut en gagner 90 à notre cause. Nous n'avons pas à parler avec les autres, nous devons les exterminer." (G. Zinoviev, 17 septembre 1918)