Affaire des assistants parlementaires : un témoignage met en cause le MoDem
Selon Le Parisien, un ancien assistant parlementaire de Jean-Luc Bennahmias a dénoncé à la justice le flou qui entourait son embauche et sa rémunération.
Au tour du MoDem d'être cité dans une affaire d'assistants parlementaires européens. Le parti de François Bayrou a-t-il utilisé des fonds européens pour rémunérer des collaborateurs qui travaillaient en réalité pour le MoDem? C'est la question que se pose la justice après les divers signalements faits fin mai par le FN, en réaction à l'enquête initiale qui le vise.
Le Parisien-Aujourd'hui-en-France révèle jeudi que la justice est en possession d'un témoignage compromettant pour le MoDem. Un ancien assistant parlementaire de l'eurodéputé Jean-Luc Bennahmias, aurait pointé du doigt certaines irrégularités autour de son poste, en 2011. Après avoir rédigé un courrier de signalement au parquet de Paris, ce témoin aurait transmis à la justice plusieurs pièces. Dont son contrat de travail initial et un avenant de détachement (auprès de Jean-Luc Bennahmias au Parlement européen) ainsi que des courriels échangés avec le directeur financier du MoDem.
Contacté par Le Parisien-Aujourd'hui-en-France, ce témoin, qui reste anonyme, explique avoir signé un contrat de travail en décembre 2010 avec le parti. Dès le lendemain, un avenant, modifiant le contrat initial, lui aurait été présenté. Une modification permettant au salarié - rémunéré par le MoDem - de devenir collaborateur à temps partiel de Jean-Luc Bennahmias au Parlement européen. En réalité, ses liens avec l'eurodéputé auraient été quasi-inexistants... «Je le croisais de temps en temps dans les locaux de l'UDF (ancien nom du MoDem, ndlr), à Paris, mais comme les autres eurodéputés. J'avais plutôt moins de relations avec lui qu'avec Marielle de Sarnez ou François Bayrou», explique-t-il à nos confrères.
«Tous les salariés ou presque disposaient de ce type de contrat»
Il ne serait jamais allé dans la circonscription du député européen, ni au Parlement européen, qui le remunèrait en partie. Toutes ses missions se déroulaient au siège parisien du MoDem. Une situation qui, comme le rappellent nos confrères, «n'est pas forcément illégale à condition, bien sûr, que les missions portent sur des activités européennes pour le compte de l'employeur, l'eurodéputé». Toutefois, l'ancien collaborateur assure qu'il n'a jamais effectué de travail pour les activités européennes de Jean-Luc Bennahmias. «Tous les salariés ou presque disposaient de ce type de contrat, de la secrétaire au directeur financier, en passant par la standardiste», jure-t-il.
L'ancien collaborateur dit même qu'on lui a demandé, en janvier 2011, de «fournir une signature vierge, à adresser par courriel, en vue de l'établissement d'un nouveau contrat de travail». «On a justifié cette demande par l'éloignement géographique de Jean-Luc Bennahmias, retenu dans sa circonscription. Bien sûr, j'ai demandé à relire d'abord le document qu'on s'apprêtait à signer pour moi. On m'a répondu que j'en disposerai très vite. Or, ce contrat, je ne l'ai jamais vu», note-t-il.
Les accusations de Corinne Lepage
Interrogé par Le Parisien-Aujourd'hu-en-France, Jean-Luc Bennahmias confirme que le témoin en question a bien été l'un de ses assistants parlementaires tout en restant flou sur les contours de son travail. «Ce n'est pas dans mes habitudes de donner des directives et consignes», élude-t-il. L'élu affirme avoir été «en règle avec l'Europe».
Mais ce témoignage résonne avec celui de l'ancienne eurodéputée Corinne Lepage, aujourd'hui en guerre contre le MoDem. Dans un livre, elle dénonçait en 2014 un «système organisé». «C'est ainsi que des assistants parlementaires servent en réalité le parti politique, et non le parlementaire», écrivait-elle. «Lorsque j'ai été élue au Parlement européen en 2009, le MoDem avait exigé de moi qu'un de mes assistants parlementaires travaille au siège parisien. J'ai refusé, en indiquant que cela me paraissait d'une part contraire aux règles européennes, et d'autre part illégal. Le MoDem n'a pas osé insister mais mes collègues ont été contraints de satisfaire à cette exigence. Ainsi, durant cinq ans, la secrétaire particulière de François Bayrou a été payée… par l'enveloppe d'assistance parlementaire de Marielle de Sarnez, sur fonds européens», affirmait-elle.