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La Grande-Bretagne doit-elle adhérer à l’Euro? - Cours d'économie - Economie internationale

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La Grande-Bretagne doit-elle adhérer à l’Euro?

 

Du point de vue des traités et malgré la crise des subprimes, les conditions de la possibilité de l’entrée de la Grande-Bretagne dans la zone euro semblent réunies. Cependant, la Grande Bretagne doit-elle pour autant entrer dans l’euro ?

 

Introduction

 

En 2005, Gordon Brown, le chancelier de l’Echiquier s'exprimait devant la Chambre des communes sur l’adhésion éventuelle de la Grande-Bretagne à l’Union économique et monétaire. En octobre 1997, il avait défini, « cinq tests » repris ensuite par Tony Blair en 1999, dont l’étude devrait permettre d’évaluer la capacité de l’économie britannique à adopter l’euro. Ces cinq critères sont : la convergence, la flexibilité, l’investissement, les services financiers, la croissance et l’emploi.

En matière de convergence, par exemple, de nombreux progrès ont été réalisés (taux d’intérêt britannique et européen sont  convergents à long terme et à court terme proches +1,15%  en Grande-Bretagne en 2003, contre +3,7% en 1997). En matière de croissance et d’inflation, l’économie britannique affiche de bons résultats (parfois même meilleurs que des membres effectifs de la zone euro). Elle satisfait également en matière de dette publique aux critères de convergence imposés par le Traité de Maastricht pour l’entrée dans l’UEM.

Car si en effet, elle est possible, cette adhésion est-elle souhaitable ?

Du point de vue britannique majoritaire, les bénéfices de l’entrée dans la zone euro s’avèreraient limités et les risques accrus en terme d’efficacité économique (I). Cependant, si la Grande-Bretagne peut perdre à adhérer à l’euro, elle pourrait, ainsi que l’UEM, perdre plus encore en restant à l’écart. On voit ainsi que si cette adhésion n’est pas souhaitée par les Britanniques, elle est cependant souhaitable (II).




I. La perspective britannique : des bénéfices limités et des risques accrus.

 

A)Les bénéfices généralement tirés de l’adhésion à une UEM resteraient limités dans le cas de la Grande-Bretagne.

 

1- Les principaux bénéfices attendus de l’entrée dans l’UEM sont au nombre de trois : la réduction des coûts de transaction, la disparition du risque de change, une plus grande transparence des prix.

 

a-Réduction des coûts de transaction.

Dans la mesure où l’entrée dans l’UEM ferait disparaître le change entre la livre sterling et l’euro, des ressources seraient dégagées du fait, par exemple, de la suppression des marges de rémunération des cambistes. Le bénéfice traditionnellement attendu estimé par une étude de la Commission Européenne est évalué à 0,4% du PIB en moyenne sur tous les Etats membres (Commission Européenne, 1990).

b-Disparition du risque de change par rapport à l’euro.

On attend de la disparition du risque de change de la livre par rapport à l’euro un accroissement des échanges intracommunautaires, l’augmentation du nombre d’investisseurs étrangers en Europe et plus particulièrement en Grande-Bretagne et enfin la diminution du coût du capital par l’intégration du marché des capitaux en livres au sein d’un marché des capitaux en euros, plus vaste et donc moins risqué.

c-Transparence des prix accrue.

Enfin, l’adoption de la monnaie unique devrait permettre aux consommateurs britanniques de pouvoir plus facilement comparer les prix des biens sur un marché où la concurrence serait de ce fait accrue.

2- Ces bénéfices seraient cependant limités dans le cadre de l’économie britannique.

a-Le bénéfice attendu de la suppression du change Livre sterling/euro serait quatre fois inférieur

à la moyenne attendue pour les autres économies de la zone (0,1% du PIB soit environ un milliard de livres par an). En effet, la majorité des conversions entre l’euro et la livre s’effectue dans le cadre d’un système bancaire très développé et automatisé. Dans la mesure où la conversion lors de transactions commerciales, ou par l’intermédiaire des paiements par carte de crédit est effectuée par un ordinateur, son coût marginal est quasiment nul ; ce qui explique le moindre bénéfice attendu de la suppression du change.

D’autre part, l’adoption de l’euro entraînerait des coûts supplémentaires très élevés en termes d’infrastructures liés aux changement de monnaie (tels que les modifications des distributeurs automatiques, distributeurs de billets de banque ou encore des systèmes comptables). Ce coût de transaction unique mais très élevé a été estimé par la Chambre des Communes en 2000 à environ 30 milliards de livres. Converti en valeur annuelle («équivalent de valeur actualisée »), ce coût  pourrait dépasser l’économie potentielle d’un milliard attendue de la disparition du change livre/euro.(Mais son calcul lui-même qui dépend largement du taux d’intérêt choisi est sujet à caution).

b-La disparition du risque de change aurait également un effet positif limité pour l’économie

britannique, dans la mesure où le Royaume-Uni effectue plus de la moitié de ses échanges commerciaux avec des pays de la zone dollar. Le contexte économique international rendant le dollar toujours plus instable face à l’euro fait peser de nombreux doutes sur le bénéfice réel de cet élément. Et quoique l’euro ait après de nombreuses périodes de baisse retrouvé son niveau d’origine d’environ 1,19 $, cet « euro fort » ayant un impact positif sur la réduction de l’inflation et le coût des matières premières, représente un frein pour les exportations hors de la zone.

c- Enfin, si l’adoption d’une monnaie unique permet traditionnellement d’accroître la transparence des prix dans les économies nationales concernées, la possibilité de comparer rapidement les prix risque de s’avérer très limitée pour les consommateurs britanniques du fait de l’insularité.

B)L’adhésion à l’Euro ne risque-t-elle pas d’affecter les bons résultats affichés par l’économie britannique ?

 

1-L’entrée de la Grande-Bretagne dans la zone euro signifie une perte d’indépendance et de flexibilité pour l’économie britannique.

 

a- Un taux d’intérêt unique et la suppression de l’instrument du taux de change limiteraient la flexibilité de l’économie britannique face à des chocs éventuels.

 Le taux d’intérêt unique pourrait particulièrement pénaliser la Grande-Bretagne à deux titres.

 -Le secteur bancaire représente au Royaume-Uni une part importante du produit national (de l’ordre de 10%). Une politique de taux intérêt mal adaptée serait donc particulièrement néfaste pour l’économie britannique, dont plus des deux tiers des emprunts se font à taux variable (contre 20% pour la France). Ils servent principalement à financer les achats de logements. Une réforme du marché de l’immobilier devrait donc être engagée avant que le Royaume-Uni n’entre dans la Zone Euro, afin de rendre le financement des logements moins vulnérables aux variations de taux.

-Les évolutions sur le marché de l’immobilier influencent également les comportements de consommation. En effet, de nombreux Britanniques financent de grosses dépenses (telles que la voiture ou l’électroménager) en souscrivant des emprunts garantis sur leur patrimoine immobilier. Les prix sur le marché de l’immobilier ont beaucoup augmenté ces dernières années. Au cas où une chute brutale surviendrait la Banque d’Angleterre relancerait rapidement, par une baisse des taux, ce secteur, qui influence positivement la consommation des ménages. Cette possibilité lui serait évidemment refusée dans le cadre de l’UEM.

Un taux d’intérêt unique et déterminé par la BCE soulève également la question de la flexibilité de l’économie britannique face à des chocs.

En effet, pour lutter contre une augmentation trop forte des salaires, le Trésor Britannique a toujours la possibilité de « laisser filer » la monnaie afin d’atténuer le choc susceptible d’affecter la compétitivité du travail. Cela ne sera plus possible dans le cadre de l’UEM et risquerait de provoquer des poussées inflationnistes fortes et de diminuer la croissance britannique dans la mesure où le marché du travail est beaucoup moins rigide en Grande-Bretagne que dans les autres pays européens.

 

b- La rigidité des règles en matière de politique budgétaire est également dénoncée par Londres.

 

En effet, alors que l’Etat britannique a amorcé une augmentation importante de ses dépenses pour moderniser ses services publics, les contraintes du Pacte de stabilité et de croissance risqueraient de pénaliser son économie. L’adoption de règles contraignantes en matière d’endettement public apparaîtrait donc totalement inopportune.

c- Quel  taux de change ?

Si le Royaume-Uni entrait dans la zone euro, se poserait-alors la question du niveau du taux de change de la livre par rapport à l’euro auquel cette adhésion se produirait. L’économiste R. Mundell a ainsi évalué qu’il faudrait attendre un cours de 0,70£ pour un euro pour que la compétitivité britannique ne soit pas affectée.

 

2- Les bons résultats de l’économie britannique en termes de croissance et d’emploi pourraient-ils être affectés par l’entrée dans l’euro ?

a-La croissance :

La GB connaît actuellement la plus grande période de croissance ininterrompue depuis cinquante ans. En 2003, l’économie britannique devrait connaître une croissance de 2%. (contre 1% de moyenne pour la zone Euro) tandis que son inflation est maîtrisée (de l’ordre de 2%) et son déficit public relativement faible. L’adoption des règles contraignantes de l’UEM ne viendraient-elles pas casser cette croissance, que beaucoup envient ? L’impact de l’adoption de l’euro sur la croissance est difficilement évaluable : si certains pays de la zone connaissent un très fort ralentissement, d’autres tels que la Grèce, l’Espagne ou l’Irlande (en phase de rattrapage) ont également connu de belles réussites.

b-Chômage 

La Grande-Bretagne connaît un taux de chômage de 5,4% (contre 8,8% en Europe). Dans ce domaine, l’adoption de l’euro pourrait avoir des effets contrastés et pas nécessairement négatifs mais la comparaison des bilans européen et britannique ne joue pas véritablement en la faveur d’une adhésion de la Grande-Bretagne à l’euro.

            Si les arguments en défaveur de l’adhésion de la Grande-Bretagne à l’euro sont nombreux, ce sont surtout des arguments politiques qui retardent l’entrée de la Grande-Bretagne dans la zone euro. Car l’adhésion du Royaume-Uni apparaît non seulement souhaitable mais à terme inéluctable.

 

II- Une adhésion non souhaitée mais souhaitable.

A)Le poids des considérations non-économiques.

 

1-Un refus plus politique qu’économique.

 

a-La difficile coopération monétaire dans le cadre européen.

-L’adhésion de la Grande-Bretagne au mécanisme de change du Système Monétaire Européen a suscité un débat très vif dans les années quatre-vingts

-En 1990, la Grande-Bretagne adhère au Mécanisme de Change Européen (MCE) mais elle en ressort deux ans plus tard.

-Enfin, la Grande-Bretagne négocie une clause d’exemption dans le cadre du Traité de Maastricht afin de rester en dehors de l’UEM.

 

Même si l’Union économique et monétaire est considérée comme une construction économique, les déterminants politiques qui la sous-tendent sont premiers au sein de l’Union Européenne même, dans la mesure où l’UEM a été conçue comme un instrument visant à une union politique européenne plus étroite.

b- Selon les Britanniques, l’UEM est, dans sa conception actuelle, trop empreinte de fédéralisme.

 

Se séparer de sa monnaie est une décision politique importante, une délégation de souveraineté symbolique très forte, qui, dans le cas de l’euro et au contraire des expériences précédentes (type MCE) apparaît irréversible.

 

De plus, voyant l’UEM comme le cheval de Troie d’une Union Européenne fédérale, de nombreux Britanniques craignent qu’une harmonisation européenne accrue ne joue en leur défaveur. Elle risque, selon eux, de signifier une réglementation accrue, des taux d’imposition plus élevés et un soutien social plus importants que ceux que connaît actuellement le Royaume-Uni. Une crainte ainsi régulièrement renouvelée est que les Britanniques ne soient appelés, dans le cadre de l’Union, à venir renflouer les systèmes de santé de pays européens connaissant des difficultés financières (Allemagne, France ou Italie).

2- Une opinion largement hostile à l’adoption de l’euro

Le gouvernement britannique actuel a rappelé que les déterminants économiques seraient les premiers pris en compte dans la décision d’adhésion, les motifs politiques ou constitutionnels étant considérés comme secondaires.

Cependant, en raison de l’importance constitutionnelle de cette délégation de souveraineté, Tony Blair a fait de l’approbation par référendum un préalable indispensable à l’entrée de la GB dans l’Eurogroupe. Or, selon une enquête du Guardian, 60% des Britanniques sont hostiles à l’euro (« record historique ») – 45% d’entre eux allant jusqu’à affirmer que rien ne saurait les faire changer d’avis. L’opinion britannique est d’autant moins favorable à l’euro après l’offensive en Irak qui a accru les euro-scepticismes britanniques.

 

Mais la question de l’adhésion de la Grande-Bretagne à la Zone euro fait également débat au sein du gouvernement. Tandis que Tony Blair s’est déclaré en faveur de la tenue d’un référendum sur cette question avant la fin de sa législature soit à l’horizon 2005-2006. Le chancelier de l’Echiquier, Gordon Brown semble d’un avis contraire.



B) Inconvénients pour la Grande Bretagne et l’UEM du maintien de la Grande-Bretagne à l’extérieur de la zone euro.

 

1-Bénéfices éventuels de l’entrée dans l’euro.

Si l’on a mis en évidence les risques que représentent pour l’économie britannique l’adhésion à l’euro, il convient de remarquer les arguments qui pèsent en faveur de l’adhésion.

a- Les investissements étrangers sont susceptibles d’être favorisés par une plus grande stabilité des changes

Une stabilité des changes accrue est susceptible de rendre l’UEM plus attractive et par là même d’accroître les investissements étrangers en Grande-Bretagne.

 

b- L’entrée de la Grande-Bretagne dans l’UEM serait également bénéfique pour l’UEM.

Dans la mesure où l’économie britannique satisfait aux critères imposés par Maastricht, l’UEM gagnerait à voir en son sein l’une des économies les plus performantes. L’adhésion de l’économie britannique pourrait également renforcer la crédibilité internationale de l’euro, dans la mesure où elle signifierait une évaluation positive de cette monnaie par le gouvernement britannique. Elle rendrait également la politique économique européenne plus cohérente sur la scène internationale.

2- Demeurer à l’extérieur de la zone euro : « coûts d’opportunité » et risques pour l’économie britannique.

 

a- L’entrée dans l’euro semble inéluctable pour l’économie britannique et rester à l’écart des instances de décisions ne lui permettent pas d’influencer l’orientation des politiques économiques de la zone euro. Les reproches majeurs adressés à la zone euro sont qu’elle se fonde sur des hypothèses que ne partagent pas les Britanniques, cependant rester à l’écart des instances de décision signifie laisser plus de temps à ces conceptions de politique économique pour s’affirmer dans la zone euro.

b- De plus, si l’UEM parvient à constituer une Zone monétaire optimale (si une véritable convergence entre les économies de la zone s’opère) alors des gains tangibles devraient advenir en termes d’accroissement des échanges, de niveau de production, et de productivité, tout en réduisant la possibilité que surviennent des chocs asymétriques. Rester à l’écart ne manquerait pas alors d’être nuisible à l’économie britannique.

Conclusion :

 

A la question de savoir si la Grande-Bretagne doit ou non entrer dans la zone euro, une analyse coûts-bénéfices ferait plutôt répondre oui. Cependant, les avantages liées à l’entrée dans l’euro apparaissent souvent amoindris par des considérations politiques. Si l’adhésion du Royaume-Uni semble à terme inéluctable, elle ne devrait pas être réalisée prochainement, dans la mesure où le bilan des cinq tests tiré le 9 juin, appuiera vraisemblablement le maintien du statu quo et où le référendum indispensable à l’adhésion n’est pas acquis.

Pour Mervyn King, futur gouverneur de la Banque d’Angleterre, il faudrait un recul de « plusieurs décennies, voire de plusieurs siècles » après une éventuelle adoption de l’euro pour être sûr que celle-ci sera produite au moment opportun. Les esprits ne semblent donc pas prêts à faire le pari de l’euro. Cependant, si d’autres Etats membres comme la Suède ou le Danemark n’ont pas fait le choix de l’euro, la capacité de celui-ci à s’imposer comme une monnaie stable sur le marché des changes internationaux devrait asseoir sa crédibilité et permettre d’accroître les bénéfices de son adoption. Déjà les résultats en progression que l’euro a affichés pourrait conduire, les Suédois à se prononcer en faveur de son adoption en septembre 2003. Question économique, l’UEM est également déterminée par des choix politiques très forts. Ainsi la question d’adhérer ou non à l’euro pose-t-elle celle plus large de la conception politique de l’Europe.