Qui ne dit mot consent-il ?
Introduction : Cet adage socratique est tiré d’une
analyse rhétorique sur celui qui est vaincu dans la joute oratoire. Celui-ci,
n’ayant rien à opposer à son contradicteur, signifierait par son silence son
approbation à l’argumentaire opposé.
« Qui ne dit mot » réfère au silence, à l’absence de
son ou d’écrit. Le consentement est le fait de donner explicitement son
accord à une décision, à une obligation ou à une demande. Pour qu’il y ait
consentement, il faut qu’il y ait deux aprties, une qui offre, et une autre qui
accepte. Il peut d’entrée de jeu apparaître paradoxal de vouloir lier dans une
même proposition deux notions aussi antinomique que le silence et l’accord
explicite. La règle du consensualisme veut certes que toute obligation, c’est à
dire tout transfert de droit, naisse de la volonté manifestée des parties.
Celle-ci peut certes naître de la parole ou de l’écrit, mais aussi de gestes, de
comportements, qui peuvent évoluer en fonction des techniques.
L’échange de consentement se matérialisera par
l’acceptation des conditions et du contrat. Cette acceptation peut être expresse
ou tacite.
S’interroger sur cette notion
en droit, c’est se demander, dans le droit des obligations, dans quels cas le
consentement explicite est nécessaire et dans quels cas le silence peut valoir
d’agrément. Selon les situations en présence, selon les principes mis en jeu, le
consentement exige l’explicitation, ou peut être tacite. Mais il s’agit surtout,
de connaître la volonté des parties, que celle-ci soit écrite ou non, qu’elle
soit exprès ou tacite. Pour cela, on doit étudier quelles sont les
manifestations de celle-ci, et comment le juge les interprète. Parfois, des
comportements manifestent la volonté, bien qu’aucune parole ou écrit ne soit
dite ou signé.
Quel est le régime général du
consentement dans le droit des obligations (légales et contractuelles) ? Dans
quels cas le silence équivaut-il au consentement ?
Après avoir étudié le régime
commun du droit, où qui ne dit mot refuse (I) nous verrons que ce principe est
limité et souffre des exceptions (II).
I/ Seule l’acceptation
explicicite et non viciée peut valoir comme consentement : qui ne dit mot ne
consent pas.
A/La règle
générale du consentement explicite pour la formation des contrats
1. art 1108 : le
consentement explicite exercé par un individu capable est une condition de
validité du contrat. De même 2. De même pour ce qui
est de la modification d’un contrat, l’art 1134 la subordonne au consentement. La
signature du client apposée au bas du contrat sera une manifestation expresse de
son consentement.
Ex : pour ce qui est du
mariage. En cas de mariage forcé, le Procureur de la République peut être saisi
et engager des poursuites. Contrat de travail – Cass. Soc., Raquin, 1987 –
modification des éléments du contrat de travail impose le consentement explicite
du salarié. Le contrat doit généralement être écrit et signé pour être
opposable ; cette signature faisant foi du consentement du signataire. Sans
contrat écrit, l’établissement de la preuve sera plus difficile.
art 1163 Quelque
généraux que soient les termes dans lesquels une convention est conçue, elle ne
comprend que les choses sur lesquelles il paraît que les parties se sont proposé
de contracter. La Cour de Cassation refuse sur le principe que l'on puisse
admettre le silence a crée une manifestation de volonté : décision du 25.05.1870
de la cour de cassation affirmant le principe que "le silence de celui qu'on
prétend obliger ne peut suffir en l'absence de toute autre circonstance pour
faire preuve contre lui de l'obligation alléguée".
Un individu qui n’aurait pu
être en mesure de donner son consentement raisonnée ne peut être soumis à une
obligation contractuelle.
Ex : l’individu illetré ne
peut être soumis à des régimes contractuels qu’il n’aurait pu comprendre ;
il
faut que les parties y aient consenti de façon libre et éclairée. Il est
essentiel que les personnes contractantes ne soient pas trompées, ni qu’elles
aient signé dans la crainte ou encore qu’elles aient été induites en erreur. Il
faut aussi qu’elles aient pu se renseigner avant de conclure une telle entente.
3. Les articles 1109 à 1116
définissent les conséquences d’un consentement vicié. erreur, violence, dol.;
ainsi, il y a réticence dolosive lorsqu’un vice est caché dans le produit, que
n’aurait pas connu le cocontractant (vend caisse, sachant que y a un problème,
il le sait, mais ne le dit pas). De même, le devoir d’information d’un vendeur
doit accompagner la signature du contrat pour que le consentement ne soit pas
vicié. Il y a nullité relative (des clauses) du contrat. La lésion constitue
dans deux cas précis une nullité relative du contrat (règle des 7/12ème
pour les biens immobilier, ou pour les assureurs maritimes).
B/
L’inviolabilité du corps humain impose le consentement pour tout acte sur
celui-ci :
1.
Sont illicites les atteintes à l’intégrité physique d’une personne sans
le consentement de celui-ci; art 16-3 impose pour intervention chirurgicale le
consentement du patient. Art L 1231-1 du CSP impose consentement pour
prélèvement d’organe (entre proches le plus souvent) devant le Président du TGI.
ou la disposition de substances corporelles. Sans celui-ci, la personne lésée
peut engager la responsabilité de celui qui prélève, (art 1382 pour le droit à
réparation, et C. pén art 511-3). Même le prélèvement post-mortem à des fins
d’étude scientifique est soumis à consentement explicite ; idem pour sa
crémation. De même, pour tout prélèvement dans le cadre d’une enquète
judiciaire. Aussi art 16-10 et CSP 1111-4 pour prélevement d’ADN – cependant ce
refus vaudra présomption simple de consentement à l’incrimination (selon
l’esprit de l’art 10 C. civ). De même, et évisemment, pour les recherches
biomédicales. Une Loi de 1988 (art 209-19 CSP) pose le consentement de celui qui
s’y soumet.
2. Pour le respect du droit à
la vie privée : Autorisation explicite obligatoire pour photos prises dans le
cadre privé (sanctions pénales art 226-1). Souffre de tempéraments si le
paparazzi montre en l’espèce que des éléments de la situation tendaient à
montrer un consentement tacite de la part des photographiés.
B/ En matière
conventionnelle, le consentement est incontournable.
1.Pour l’application des traités : nécessité d’un triple consentement explicite
pour la conclusion d’une convention internationale. La signature, d’abord, mais
aussi le ratification interne, et enfin, l’application matérielle. Si l’une des
trois expression du consentement vient à manquer, la clause non adimpleti
contractus permet à l’autre Etat de ne plus appliquer la convention. => Cette
clause est intéressante en ce qu’elle déroge au principe « nul ne peut se faire
justice soi-même ».
2.Pour la saisine du juge international : Le consentement des deux parties d’un
différend international est nécessaire pour la saisine de la CIJ (malgré une
résolution en sens contraire de l’AGNU en 2003 mais sans valeur juridique) – cf
problème mur isralo-palestinien.
Transition : Le principe du consentement
explicite s’applique généralement lorsque il aboutit à des obligations, ou à
des transferts de droits par un sujet ; or, souvent le consentement à un
droit n’a pas besoin d’être explicité. Au contraire de nombreuses situations de
fait ou de droit imposent d’interpréter le silence comme consentement.
II/ Où le silence vaut
consentement
A/ Exceptions au principe de consentement explicite pour les contrats
1.
Le primat de la manifestation de la volonté : On considère que la
manifestation peut être quelconque pourvue qu'elle soit établie de façon
certaine. Le simple consentement suffit à lier les contractants, sans qu'il soit
nécessaire d'établir une formalité. Dans d’autres
cas, il n’y a pas de contrat signé, mais une entente verbale des termes du
travail à exécuter, que l’émission d’un chèque de paiement viendra confirmer et
ratifier. Et même si on l’a vu, la jurisprudence considère qu'il vaut
mieux posséder un écrit, le consentement peut résulter d'un échange de parole ou
d’un simple geste non équivoque. Le consentement explicite n’est ainsi pas
nécessaire dans toute la majorité des contrats usuels qui ne demandent qu’un
contrat oral, contrat pourtant, et qui peuvent être créés sans que mot ne soit
échangé. Le maquignon de la foire au bestiaux de Chateaux-Gontier ; toutes les
ventes, les achats, qui ne se font que rarement (pour les contrats importants)
par contrat écrit. Le silence, par habitude a accompagné le consentement. De
même ; l’art 1160 dispose que « l’on doit suppléer
dans le contrat les clauses qui y sont d'usage, quoiqu'elles n'y soient pas
exprimées. ». Ex : la vente aux
enchères. Dans les contrats administratifs, , l’arrêt Bertin de 1956 montre
comment un simple le contrat verbal peut constituer une manifestation de
consentement valant comme consentement administratif. Il existe dans les
contrats administratifs des clauses non écrites auquel consent sans dire mot le
cocontractant du seul fait qu’il signe avec l’admiunistration. la théorie de
l’imprévision pose qu’un évenement non prévu dasn le contrat peut donner lieu à
modification unilatérale du contrat par l’administration. Cela donnera lieu à
répatration pour responsabilité pour risque. Le cocontractant de
l’administration consent à la clause de mutabilité, qu’il y ait consenti ou non.
Le problème du lien entre la manifestation de la volonté et l’apport de la
preuve : Pour ue le juge puisse se prononcer, il faut qu’il y ait un acte écrit
de manifestation de la volonté. Droit romain impose que la preuve soit établie a
priori de la survenance d’un contentieux. Le problème est notamment posé pour
les contrats entre absents (vente à distance, par téléphone, par internet
incertitude quant à l’identité des cocontractants, pas de support écrit). Ici le
consentement pourra être donné par téléphone (ex : marché monétaires). Le juge
étudiera la situation au cas par cas, et devra, malgré l’immatérialité de la
transaction juger si le consentement a bien été donné. Des systèmes ont été mis
en place (signature électronique p. ex)
2.
Pour la modification ou la reconduction du contrat :
En droit
des contrats, la Loi du 20 décembre 1993, n’a plus rendu nécessaire le
consentement du salarié à une modificatio de son contrat de travail, s’il s’agit
d’une procédure de licenciement économique.
A
reconduction tacite du contrat par comportement actif non formalisé (paiement du
bail, fourniture régulière à un client qui paye, etc…). A chaque fois qu’il y a
reonduction tacite (du bail par exemple, il y a formation d’un nouveau contrat.
On notera
que le consentement peut être tacite. Il peut résulter résulter de tout fait et
de toute attitude impliquant, qu'une personne a voulu contracter. La
manifestation de la volonté prime sur son explicitation ; c’est le juge qui,
dans son interprétation souveraine, peut présumer ou non ce consentement.
3.
La requalification du juge en fonction de la manifestation de la
volonté:
Art 1156
dispose que le juge n’est ps tenu de s’arreter au sens littéral du contrat, mais
peut étendre son analyse à la volonté, même implicite des parties. On avait vu
en première partie que si les termes sont trop généraux, ils se limitaient à la
volonté véritable des parties. A l’inverse, l’art 1164 ne limite pas la volonté
des parties à un exemple qui serait stipulé dans le contrat. Au contraire,
l’obligation n’ets pas restreinte, et peut s’étendre à des exmple non cités dans
le contrat. Lorsque l'offre a été faite in favorem,
c'est à dire en faveur de celui à qui elle est adressée, elle est faîte dans
l'intérêt exclusif de celui à qui elle est adressé. Elle permet de reconnaître
le silence. Aussi si un bailleur écrit au locataire pour le faire profiter d'une
baisse de loyer, le silence de ce dernier vaut acceptation puisque l'offre est
faîte dans son intérêt exclusif. S’il yt a eu discustion on parlera de
pollicitation En général, dans le domaine des assurances, le juge du
fait peut requalifier le silence comme consentement , dans des cas précis,
notamment, lorsque c’est favorable au demandeur. Ainsi, un assuré qui change
d’assureur, résilie tacitement son ancien contrat, sans qu’il puisse être
redevable de dommage et intérêt. On parlera de contrat d’adhésion s’il n’y a pas
de discussion.
B/ L’inviolabilité du corps humain et le consentement impossible, inutile, ou
inadapté à la situation d’urgence
1.
dans les cas d’urgence, si consentement non possible en temps
utile et non nécessaire un intervention peut être pratiquée si c’est dans
l’intérêt d’autrui (ex : témoin de Jéhovah refusant une transfusion sanguine,
pratiquée sans son consentement mais restant manifestement la seule issue
vitale).
2.
Le consentement impossible post-mortem Individu plus en mesure
d’ester en justice. pour les greffes d’organes, les art 1232-6 (inscription sur
registre de refus des dons) et 671-7 CSP aboutit à le régime du « consentement
présumé » – Le prélèvement sans le consentement de la faimille est licite, mais
l’hôpital engage sa responsabilité vis-à-vis de la f amille – présomption
simplement réfragable donc de consemtement ; mais à défaut de de manifestation
de refus, le prélèvement est possible. De même, pour ce qui est de l’autopsie.
On le voit dans cet exemple, la question de savoir si l’adage « qui ne dit mot
consent » se heurte à l’opposition entre plusieurs objectifs très différents :
accroître les chances de sauiver des vies ; défendre la dignité de la personne
humaine. De même la mort ne protège plus le consentement d’un homme sur les
prélèvements génétiques qui peuvent être effectués sur lui.
3.
L’incapacité, la tutelle et la substitution du consentement : le
consentement de la personne qui exerce la tutelle se substitue à la personne
connaissant une incapacité (mentale ou juridique) : l’article 1123 rent
incapable de contracter les mineurs non émancipés et les majeurs protégés. En
cas d’incapacité d’une des parties le contrat est frappé de nullité relative.
Ainsi, comme, on l’a vu la semaine dernière, sur la circoncision (exception
quasi-coutumière dans le cas religieux, à l’inviolabilité du corps sans
consentement explicite). Mais on remarqura que pour ce qui est de l’internement,
le consentement du patient est nécessairesauf pour ce qui est de l’hôspitalisation
en raison de trouble mentaux, qui peut être faite sur demande d’un tiers, ou
pour raison d’ordre public.
Conclusion : On l’a vu,
cet adage souffre bien des tempéraments dans son application, selon les
situations, selon les domaines de droits. Différents principes s’opposent quant
à sa légimité. Parfois, son application est inique ; d’autre fois, il est
favorable aux sujets de droit. Comme tout adage, cette maxime n’a pas de portée
morale universelle.