Dossier : l'ordre économique international

 

 

·        Qu’est-ce que la mondialisation ?

 

·        Le nouvel ordre économique international

 

·        Commerce international, GATT et OMC

 

·        Ruptures et continuités du système monétaire international

 

·        Le Fonds Monétaire International et la gestion des crises financières

 

·        Les firmes multinationales

 

·        Les ONG

 

·        Les inégalités de développement aujourd’hui

 

·        L’aide aux pays en développement

 

·        Phénomènes migratoires

 

·        Santé et environnement

 

·        La criminalité internationale à l’heure de la mondialisation

 

·        L’altermondialisme

 

·        Une gouvernance mondiale est-elle possible ?

 

 

 

 

Qu’est-ce que la mondialisation ?

 

Définition : Emergence d’un vaste marché mondial de biens, de services, de capitaux et de la force de travail, s’affranchissant des frontières politiques, et de ce fait, limitant la capacité des Etats à influer sur l’activité intérieure et sur les structures économiques nationales. Elle se caractérise plus généralement par :

1) La diffusion mondiale du modèle de production capitaliste

2) L’apprentissage d’une interdépendance croissante entre les Etats

3) La quête de nouveaux cadres de régulation dépassant celui de l’Etat-nation : émergence d’institutions régulatrices internationales et d’un droit international.

 

I Les faits :

La mondialisation s’est traduite par :

1) -Un accroissement des échanges supérieur à la croissance de la production dans le monde.

-La tendance s’est particulièrement accentuée depuis les années 80.

-Cependant, notons que 75% des échanges de biens et de services se font entre les trois membres de la Triade : L’Union Européenne, les Etats-Unis et le Japon. Un espace économique hiérarchisé se crée autour de ces trois pôles.

Mais le taux d’ouverture de ces Etats peut être lui-même limité (12% pour les Etats-Unis).

-Une hausse considérable des investissements directs à l’étranger (IDE): vers la Chine, les Dragons, les Tigres

2) Une disparition progressive des barrières douanières dans le cadre du GATT (1947) puis de l’OMC (1995) : Multiplication des accords de libre-échange : ALENA, MERCOSUR, ASEAN, CEE…

3) Des pratiques mondiales, dont les multinationales sont le vecteur :

-les multinationales représentent 25% de la production mondiale : économie d’échelle et exploitation des avantages comparatifs de chaque pays.

4) Une globalisation financière toujours plus poussée :

-Environ 1250 milliards de dollars sont échangés chaque jour alors que la production mondiale quotidienne est de 100 milliards de dollars !

-Fruit du vaste mouvement de dérégulation et de désintermédiation des années 80.

5) Une révolution des transports et un essor des nouvelles technologies de l’information et de la communication :

-coût du transport maritime divisé par 3 entre 1920 et 1960, par 10 pour le transport aérien depuis 1920 et par 100 des communications téléphoniques entre 1920 et 1970

-Instantanéité de la diffusion de l’information

6) C’est aussi la mondialisation des problèmes : l’environnement, la criminalité, le terrorisme… et l’émergence d’une opinion publique mondiale, dont nombre d’ONG se disent le porte-parole.

 

II Mythes et réalité de la mondialisation

1) Monde uniformisé, abolition des identités, écrasement des faibles…Oppositions qui se sont cristallisées à Seattle en 1999, lors de la réunion de l’OMC. Qu’est-ce réellement que l’alter mondialisme ?

2) Les multinationales sont stigmatisées : Accusées de profiter de conditions de travail injustes dans des pays qui pratiquent le dumping social, elles ont néanmoins permis aux pays nouvellement industrialisés (NPI), en Asie en particulier, d’obtenir des devises, des transferts technologiques et des emplois. C’est en se confrontant au commerce international, par le biais des multinationales, tout en protégeant certains secteurs vitaux de l’extérieur, que des pays comme la Corée du Sud ou Taiwan se sont industrialisés.

3) Idée d’un fossé toujours plus grand entre les riches et les pauvres est à relativiser : De nombreux pays ont décollé grâce au commerce international : Tigres et Dragons

Les pays qui ont échoué sont au contraire restés à l’écart du commerce international : problème de gouvernance interne aux pays pauvres, insécurité juridique, politiques économiques de développement autocentré désastreuses (Ex : Algérie 1967). Qui sont les gagnants et les perdants de la Mondialisation ? L’aide au développement a-t-elle échouée ?

4) On stigmatise le FMI, la Banque Mondiale et l’OMC. Quel rôle jouent réellement ses institutions de régulation globale ?

5) Au sein même des pays riches, on craint la mondialisation pour ses effets néfastes sur l’emploi (délocalisation) et pour ses effets sociaux : Mais l’ouverture des pays développés relativement à leur PIB est très faible. Ce sont surtout les emplois non qualifiés qui pâtissent des délocalisations. De plus, l’essentiel des emplois (plus de 70%) de nos économies appartiennent au secteur tertiaires : ce secteur est le moins mondialisé.

 

Bibliographie :

Ramsès 2001, introduction de Thierry de Montbrial,

18 leçons sur la politique économique, Seuil

 

Le nouvel ordre économique international

 

  • L’ordre économique mondial existant s’est construit à la suite de la deuxième guerre mondiale. A cette époque, les Etat industrialisés à économie de marché, menés par les Etats-Unis, ont voulu rétablir rapidement le libre jeu du marché dans leurs relations mutuelles. Des organisations internationales et des normes conventionnelles internationales ont été créées dans ce but.
  • Les règles dont le respect est assuré par le Fonds monétaire international (FMI) ou le General agreement on tariffs and trade (GATT), devenu l’Organisation mondiale du commerce (OMC) vont toutes dans ce sens.

 

  • Face à cette construction d’essence libérale, les pays du Tiers monde ont revendiqué un nouvel ordre économique international. L’Assemblée générale de l’ONU a ainsi adopté lors de sa 6e session extraordinaire la déclaration et le programme d’action concernant l’instauration d’un nouvel ordre économique international, par le biais des résolutions de l’Assemblée générale des Nations Unies 3201 et 3202 du 1er mai 1974, et 3281 du 12 décembre 1974 (Charte des droits et devoirs économiques des Etats).
  • Cet ordre économique doit être « fondé sur l’équité, l’égalité souveraine, l’interdépendance, l’intérêt commun et la coopération entre tous les Etats, indépendamment de leur système économique et social, qui corrigera les inégalités et rectifiera les injustices actuelles, permettra d’éliminer le fossé croissant entre les pays développés et les pays en voie de développement » (résolution 3201 de l’Assemblée générale des Nations Unies).
  • Il a pour caractéristiques essentielles la méfiance envers la concurrence pure et parfaite pour assurer le développement des pays en voie de développement, la prise en compte de critères sociaux et non plus seulement économiques dans la notion de développement, la distinction entre les pays développés et les autres, permettant à ceux-ci de bénéficier de régimes préférentiels, et au niveau institutionnel la reconnaissance du principe « un Etat, une voix » et le rejet des organes restreints.

 

  • Cette prise de position est l’aboutissement d’une évolution historique rapide. A partir des années 60, l’arrivée sur la scène internationale des pays anciennement colonisés a posé la question de l’application des règles économiques internationales à des pays inégalement développés. Ainsi, le slogan « Trade not Aid » revendique-t-il un accès à une situation d’égalité entre les pays développés et les pays en voie de développement.
  • En 1964, la première Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED) préfigure la recherche d’un nouvel ordre économique international, avec l’adoption de 15 « principes généraux » qui en constitueront la base.

 

  • Mais la mise en œuvre de ce nouvel ordre économique international n’est pas satisfaisante pour les pays qui le réclament.
  • Le Tokyo round et l’Uruguay round ont montré que les négociations commerciales mondiales étaient toujours dominées par les grandes puissances économiques et les maigres réalisations telles que la convention de Lomé I entre la CEE et les Etats ACP mettent en valeur l’échec d’un changement global de politique.
  • Le concept de nouvel ordre économique international a débouché sur la notion de développement durable, idée force de la déclaration de Rio du 13 juin 1992 qui vise notamment à intégrer la protection de l’environnement dans le processus de développement.
  • L’émergence, lors des négociations de l’OMC à Cancun en septembre 2003, d’un groupe de pays en voie de développement, dit G21, qui a provoqué l’échec de la conférence, peut être le signe d’une importance renouvelée des pays en voie de développement dans les relations économiques internationales, mais l’existence et les réalisations de ce groupe restent encore précaires.

 

 

Commerce international, GATT et OMC

 

  • La charte créant l’Organisation internationale du commerce, signée en 1948 mais jamais ratifiée, laisse la place à la démarche de négociation d’un accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (General agreement on tariffs and trade, GATT) qui n’est pas une organisation internationale, et débute en 1947.
  • Le GATT est fondé sur certains principes :
    • la clause de la nation la plus favorisée, qui prévoit que toutes les parties bénéficient d’un abaissement de tarifs accordé dans des négociations bilatérales,
    • le principe du traitement national qui prévoit que les produits importés doivent être à égalité de traitement avec les produits nationaux similaires,
    • l’interdiction des restrictions quantitatives,
    • l’interdiction du dumping et des subventions publiques.

 

  • Dillon round (1960-1962) : réduction des droits de douane de 20% mais maintien de nombreux pics tarifaires.
  • Kennedy round (1964-1967) : réduction des droits de 35% et limitation des pics tarifaires.
  • Tokyo round (1973-1979) : réduction des droits de douane de 34%, particulièrement sur les transports et les produits chimiques, mais surtout importance des négociations sur la réduction des obstacles non tarifaires, notamment les normes techniques, les procédures de licence à l’importation, les droits compensateurs et les marchés publics.
  • Uruguay round (1986-1994) : prise en compte dans les négociations de l’agriculture et des échanges de services, des investissements et de la propriété intellectuelle. Les accords de Marrakech de 1994 prévoient une diminution de 38% des droits de douane.
  • Surtout, ces accords créent l’OMC, effective depuis le 1er janvier 1995, qui remplace le GATT. Véritable organisation internationale, elle a pour particularité de régler les différends commerciaux entre les pays membres à travers l’organe de règlement des différends (ORD).
  • Parallèlement à ces accords internationaux, de nombreuses organisations régionales ont été créées notamment pour favoriser les échanges commerciaux en leur sein. La communauté économique européenne, avec la création d’un marché unique, en est l’exemple le plus abouti.

 

  • En terme de structure, la prépondérance des produits manufacturés par rapport aux matières premières commence à apparaître à la fin des années 50. Aujourd’hui, plus de 80% des produits exportés sont des produits manufacturés contre 50% dans les années 60), 10% des produits agricoles et 10% des produits miniers et énergétiques.
  • Aujourd’hui, le commerce intra-branche entre des pays de niveau de développement comparable est prépondérant.

 

  • En termes géographiques, les Etats-Unis voient leur position dominante remise en question. En 1945, ils effectuaient 20% des exportations mondiales et se sont vus concurrencés par la RFA, puis le Japon, et enfin l’espace commercial européen qui, dès le milieu des années 60, devient la première zone commerciale dans le monde, l’Europe occidentale réalisant aujourd’hui 43% du commerce mondial.
  • Depuis 1945, le commerce mondial est marqué par la triade CEE/Etats-Unis/Japon qui représente plus de 60% du commerce mondial à la fin des années 60.
  • Les pays en voie de développement sont pour l’essentiel exclus de l’expansion commerciale internationale, même si les NPI ont su tirer parti de ce facteur pour assurer leur développement, accroissant ainsi la place des pays en développement dans les échanges de produits manufacturés.
  • L’évolution récente est marquée par l’importance croissante de la Chine dans les échanges internationaux, et notamment par le déficit commercial américain vis-à-vis de la Chine.

 

  • Le développement du commerce mondial depuis 1945 est dû essentiellement à l’essor de la production mondiale, au système monétaire international stable et à cette accélération de la libéralisation des échanges internationaux.
  • Seules les années 1975 et 1982 ont vu des baisses en volume de 3% des échanges mondiaux de marchandises, dues aux deux chocs pétroliers. A ces exceptions près, ces échanges ont augmenté plus vite que la production mondiale depuis 1973. Ainsi, de 1990 à 1997, les exportations mondiales de marchandises se sont accrues en volume de 5,8% en moyenne contre une croissance de la production de 2% par an. Toutefois, l’essor est moins grand depuis le 1er choc pétrolier : 5,4% en moyenne de 1973 à 1997 contre 8,5% en moyenne de 1963 à 1972.
  • La valeur des exportations mondiales de marchandises en 2003 est proche de 6000 milliards de dollars.

 

  • Aujourd’hui, en l’absence de droit de douanes pouvant encore constituer un obstacle aux échanges puisque le niveau moyens des tarifs douaniers est aujourd’hui de 4%, les négociations sont rendues plus difficiles et portent notamment sur les investissements directs internationaux (échec de l’accord multilatéral sur les investissement (AMI) en 1998), les subventions agricoles des pays développés qui suscitent la fronde des pays en voie de développement ou encore les biens culturels, qui voient s’opposer différentes conceptions au niveau international. En témoignent l’échec de l’ouverture d’un nouveau cycle de négociations lors de la conférence de Seattle en 1999, ainsi que l’échec des négociations à Cancun en septembre 2003, du fait de l’opposition d’un groupe de pays en développement appelé G21.

 

 

Ruptures et continuités du système monétaire international

 

Le système monétaire international est au cœur des échanges de biens et de capitaux. Sa bonne organisation et le respect de ses règles jouent un rôle prépondérant dans la fluidité du commerce international.

Constitué progressivement à partir de la fin du XIXème siècle autour du « gold exchange standard », ce système a permis d’homogénéiser les règles monétaires du commerce international et a donc participé de l’essor sans précédent des échanges durant tout le XXème siècle. Cependant, comme tout système, il connaît des failles, qui se révèlent au fur et à mesure  des crises. C’est pourquoi le SMI a été modifié plusieurs fois au cours du XXème siècle, modification qui ont pris en compte les évolution des rapports de richesse, de puissance, et aussi la crédibilité relative des monnaies.

 

Comment a-t-il évolué ? Quelles sont les principales caractéristiques et problématiques du système monétaires contemporain ?

 

I.                          Bretton Woods : un système de stabilité, conditionné à la prudence monétaire américaine

 

Remis en question durant l’entre deux guerre du fait de la fermeture relative des économies nationales concomitante à la crise des année 30, l’étalon-or a laissé place en 1944 au système défini par les accords de Bretton Woods. Les alliés souhaitaient y préparer l’après-guerre économique en bâtissant une structure monétaire stable qui nourrirait et faciliterait l’accroissement des échanges internationaux. Il fallait éviter le syndrome de fermeture économique et l’éclatement du système monétaire en zones distinctes qui avaient prévalu durant l’entre-deux guerres, ces facteurs ayant joué un rôle non négligeable dans la montée du conflit mondial. Dans cet objectif, les gouvernants de l’époque, conseillés notamment par l’économiste Keynes, ont opté pour :

-                     la fixité des taux de change, qui n’empêchait pas des dévaluations ou des appréciations, lorsque les déficits de balance courante de certains pays risquaient de diminuer de façon trop importante les réserves de la banque centrale. Cette fixité est accompagnée d’une marge de fluctuation de 2,25 %.

-                     un étalon dollars-or, c’est à dire un monopole de convertibilité du dollars contre l’or à 35$ l’once. Le dollars devenait la principale monnaie de réserve mondiale et donnait aux Etats-Unis un quasi-monopôle de la production monétaire internationale.

-                     la création du FMI, chargée de compenser les déséquilibres et d’agir en prêteur de dernier ressort.

La fixité des taux. Lorsqu’un Etat faisait appel de façon répété au FMI (suite à des déséquilibre de balance des paiements), il devait se plier aux recommandations du FMI en matière de politique macroéconomique intérieure (cf. aussi fiche technique FMI). De même lorsque un Etat atteignait un niveau de déficit prolongé et qu’il était victime d’attaques spéculatives sur la monnaie, il pouvait dévaluer, ce qui lui permettait de rétablir sa balance commerciale à moyen terme. En réalité, les anticipations monétaires étant « rationnelles », la simple possibilité d’une dévaluation à moyen terme entraînait des attaques spéculatives à court terme.

 -   Conditions de fonctionnement du système : les Etats-Unis devaient dégager des surplus de balance courante (1944-1965), faute de quoi les USA devaient produire des dollars pour financer leur déficit, ce qui rognait la crédibilité du dollars.

 

Dès 1965, l’inversion du solde de la balance des paiements produisit des inquiétudes dans les pays qui avaient d’importantes réserves en dollars. La quantité de plus en plus importante de dollars dans le monde rendait de plus en plus fictive la fixité de la valeur du dollars, ce qui a entraîné une exportation de l’inflation américaine. De façon symbolique, le général de Gaulle décida, en Août 1967 de vendre des dollars contre de l’or.

 

Bien qu’ayant connu quelques phases d’incertitude (dévaluation britannique de 1967, attaques spéculatives sur le franc et la lire dans les années 70), ce système a  permis d’assurer la stabilité monétaire des échanges internationaux jusqu’en 1973. A cette date, les failles du système ont atteint leur point critique. Les Etats-Unis ayant dépassé l’offre « prudentielle » de monnaie, ils furent contraint en Août 1973 de suspendre la convertibilité or/dollars pour éviter une fuite de l’or américain, et de dévaluer le dollars (de 11%, puis de 7%) pour redresser l’équilibre commercial. Les accords de la Jamaïque (1976) entérinent la fin de la fixité des changes et président à la mise en place du système actuel de taux flottants.

 

II.                       Le système monétaire contemporain illustre la prégnance du principe de dérégulation dans les économies modernes et consacre l’éclatement des zones monétaires

 

Le système a connu des évolutions notables :

-                     Informatisation des échanges monétaires et traduction instantanée des phénomènes de marché dans les taux. Les moyens technologiques d’échanges monétaire ont permis une certaine efficience du marché monétaire.

-                     Les Créations du Serpent Monétaire Européen (1973), puis du Système Monétaire Européen (1979) président au phénomène de division du SMI en zones monétaires régionales. Les banques centrales étaient obligées d’intervenir si leur monnaie sortait de la marge de fluctuation de 2,25%. Un sytème de prêts entre banques centrales garantissait la symétrie des interventions. Créés originellement pour éviter les fluctuations chaotiques entre les monnaies européennes, et pour compenser les différentiels d’inflations entre Etats membre, ces embryons de zones monétaires aboutierent à l’Union Economique et Monétaire, par le traité de Maastricht, qui a amené onze pays à se doter d’un monnaie unique, l’euro, en 2001.

-                     Système de changes flottant entre aires monétaires. Dans ce cadre, la politique monétaire est plus autonome, les taux de changes faisant office de carapace ajustable, de stabilisateurs automatiques alors que les déséquilibres en système fixe ont un impact plus important sur l’économie intérieure, puisque c’est la seule variable d’ajustement. Enfin, le système flottant consacre le fin de la dissymétrie monétaire qui existe dans un système d’étalon.

-                     Cependant un système flexible risquait d’ouvrir la possibilité de politique inflationnistes, accroissait le risque d’attaques spéculatives, rendait plus imprévisible l’évolution des prix relatifs, et réduisait finalement le niveau de coordination des politiques nationales. Les politique de dévaluation compétitive menées dans les année 80 en France sont symptomatiques de  l’illusion d’autonomie qui préside au mécanisme de tau de change flottants. Illusion parce que la dévaluation pouvait entraîner une baisse du crédit de la monnaie en question et finalement entraîner d’autres dévaluations en chaîne.

-                     Le système monétaire fait également intervenir un très grand nombre nombre d’agents privés dont certains, par leur masse financière, sont en mesure à eux seul de peser sur la détermination des taux de change. Le marché interbancaire international, le marché à terme de couverture des risques monétaires influencent le marché monétaire international.

 

On le voit, ce système se caractérise par une absence d’unité dans la fixation des taux de change. Le système monétaire international actuel est en effet déterminé par les décisions de chaque Banque centrale et le niveau des taux de change est la traduction immédiate de l’interaction des décisions déconcentrées d’Institutions qui établissent leur actions en fonction d’objectifs et d’intérêts internes distincts, non coordonnés entre zones monétaires, et parfois divergents. La Féderal Reserve Bank (Fed), et la Banque Centrale Européenne font toutes deux autorité sur les plus grandes zones monétaires internationales, et leur décisions ont une incidence sur toutes les autres zones monétaires. Il y a interdépendance, mais pas coordination. Or, la stabilité monétaire internationale est proportionnelle au niveau de coordination des politiques économiques entre zones. L’amplitude de l’évolution du taux de change entre l’euro et le dollars, depuis 1999 atteste d’une part des différences dans les modalités d’interventions de la Fed et la BCE, et d’autre part de la montée en puissance rapide de l’euro, dans les échanges internationaux. La Fed aurait une politique plus keynesienne, n’hésitant pas à se servir des taux pour relancer l’activité, alors que la BCE se contente d’une politique de crédibilisation de l’euro, selon des principes plus monétaristes de gestion monétaires.

 

D’où la problématique de la politique de la BCE : Comment crédibiliser l’euro pour en faire un instrument central du commerce mondial sans dégrader le niveau de croissance ? La réponse consiste en un taux d’intérêt – influant directement sur le taux de change - qui réalise cet équilibre. Le mandat de la BCE, limité à la préservation de la stabilité monétaire et des prix, traduit le devoir de renforcer l’euro pendant la période de lancement, face à un dollars qui a été produit en grande quantité pendant cinquante ans, pour financer un déficit commercial structurel. Si ce dernier ne perd pas de son poids et de son influence dans le commerce international du fait du crédit que lui apporte la puissance de l’économie intérieure américaine, il voit sa crédibilité néanmoins réduite par sa surproduction, autrefois permise par son statut de monnaie étalon. C’est la cause principale de sa chute et de l’appréciation rapide de l’euro, après sa phase de lancement. Signe de cete montée en puissance : la constitution des réserves en euro par les banques centrales des différents Etats du monde.

 

La problématique actuelle du système monétaire international réside donc dans cette rivalité qui existe entre une monnaie, le dollars, traditionnellement au cœur des échanges réels et financiers internationaux, et la montée en puissance d’un euro géré avec toute la prudence d’un monétarisme éclairé.

 

 

Le Fonds Monétaire International et la gestion des crises financières

 

 

Le Fonds monétaire international (F.M.I.) est né en juillet 1944, lors des accords de Bretton Woods : les quarante-cinq États en guerre contre les puissances de l’Axe souhaitaient mettre en place un instrument de régulation pour promouvoir et coordonner les politiques monétaires, en vue de favoriser la reconstruction et le développement économiques. Le 27 décembre 1945, vingt-neuf pays ont ratifié ses statuts.

 

Fonctionnement du FMI

 

Selon l’article 1er des statuts, le FMI a été créé pour :

-         promouvoir la coopération monétaire internationale

-         faciliter l’expansion et la croissance équilibrées du commerce mondial

-         promouvoir la stabilité des changes

-         aider à établir un système multilatéral de paiements

-         mettre temporairement (moyennant des garanties adéquates)ses ressources  à la disposition des Etats membres confrontés à des difficultés de balance des paiements

-         abréger la durée et réduire l’ampleur des déséquilibres des balances de paiements des Etats membres.

Le FMI s’efforce donc d’assurer la stabilité du système financier international et de créer les conditions d’une croissance économique durable.

 

Le F.M.I. n’est pas une institution indépendante : il est dirigé par des représentants des États membres, rassemblés au sein des différentes instances de décision.

-         le Conseil des gouverneurs est composé d’un représentant par Etat membre : tous les gouverneurs se réunissent une fois par an, lors de l’Assemblée annuelle du FMI et de la Banque mondiale, pour examiner les activités du Fonds et adopter de grandes décisions (révisions de statuts, admission de nouveaux pays membres…)

-         le Comité monétaire et financier international (CMFI) est formé de 24 gouverneurs, qui se réunissent deux fois par an afin de proposer de grandes orientations concernant le système monétaire international et le fonctionnement du Fonds. Il a remplacé le Comité intérimaire en septembre 1999.

-         le Conseil d’administration, formé de 24 membres, siège à Washington. Il est présidé par un Directeur général (européen par convention tacite) nommé pour 5 ans, assisté de trois Directeurs généraux adjoints ; il s’occupe de la gestion courante. Cinq administrateurs sont nommés par les pays ayant les plus grosses quotes-parts (Etats-Unis, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni), un est nommé par le pays ayant le plus gros créancier (Arabie Saoudite), et les autres sont élus par les groupes de pays (dont un pour la Chine seule).

-         les « clubs techniques » : le Groupe des 15, créé en 1990 pour représenter les pays émergents, a été remplacé en 1999 par le Groupe des 20, qui  réunit les pays du G7, l’Union européenne (en tant qu’institution), et douze pays du Sud : Afrique du Sud, Arabie Saoudite, Argentine, Australie, Brésil, Chine, Corée, Inde, Indonésie, Mexique, Russie, Turquie.  Il représente 87 p. 100 du revenu national brut mondial. Aucun pays d’Afrique centrale ou occidentale n’y figure.

 

Le FMI compte aujourd’hui 184 Etats membres, dont les droits de vote sont liés au montant de leur quotes-parts (contrairement au principe « un pays, une voix » appliqué aux Nations unies). La quote-part est calculée en fonction de différentes variables économiques (PIB, flux de commerce extérieur, réserves internationales), et elle détermine le montant de la souscription du pays concerné, le nombre de voix dont il dispose, son plafond d’accès aux ressources financières du FMI. Malgré une pondération des droits de vote, les États-Unis (17 % des quotes-parts) et l’Europe (30%) pèsent énormément dans la direction du Fonds. Le total des quotes-parts représentait 311 milliards de dollars EU au 31 août 2003.

 

Le rôle du FMI dans la gestion des crises financières

 

Entre 1994 et 1999, dix pays ont connu de graves crises financières, lesquelles ont eu des répercussions sur l’ensemble de l’économie mondiale. La crise de 1929 (« jeudi noir ») ne s’était étendue que progressivement à l’ensemble des pays industrialisés. Aujourd’hui, le risque de contagion financière apparaît beaucoup plus immédiat : les pertes enregistrées dans un pays à la suite d’une dévaluation encourageant les opérateurs à se désengager des marchés perçus comme les plus exposés au risque de change. La fuite des capitaux s’autoentretient, et elle provoque l’effondrement des réserves de change, qui entraîne celui des taux de change.

Les institutions de Bretton Woods ont été incapables de prévenir les crises financières qui ont touché l’Asie (1997-1998), l’Amérique latine et centrale (1999) ou la Russie (1998) au cours des dernières années. Le « consensus de Washington » a par conséquent été remis en cause, de nombreuses critiques étant adressées au FMI. Si les crises ont longtemps été considérées comme des phénomènes inévitables, caractéristique intrinsèque du capitalisme (Kindleberger, 1994), la prévention apparaît aujourd’hui insuffisante : elle doit être doublée de politiques de gestion des crises.

 

L’exemple de l’Argentine est particulièrement frappant. Ce pays était fréquemment cité en modèle auprès des pays en développement lourdement endettés. Il s’efforçait notamment de mettre en œuvre les principes du « consensus de Washington » (flexibilité, ouverture de l’économie et retrait de l’Etat). Mais en 2002, l’économie argentine, en récession depuis 4 ans, connût l’une des plus graves crises de son histoire, malgré la mise en place d’un plan de sauvetage par le FMI. Cette crise s’accompagna d’une forte dégradation des conditions de vie : chute des exportations et de la consommation, stagnation de la production industrielle, dévaluation de la monnaie, hausse des taux d’intérêts, déflation… entraînèrent une détérioration des services publics et un important appauvrissement de la population.

Aucun des plans de rigueur budgétaire présentés par les gouvernements successifs ne parvint à enrayer la faillite de l’État. Le FMI interrompit son aide en décembre 2001, et à la fin de l’année 2002, le pays était au bord de la cessation de paiement. Le président  Eduardo Duhalde avait notamment déclaré le pays « en faillite », et annoncé la fin de la parité entre le peso et le dollar.

 

Une nécessaire réforme du système monétaire et financier international

 

L’effondrement économique et financier de l’Argentine a démontré le caractère inadapté du cadre de résolution des crises financières internationales qui prévalait jusqu’alors.

En effet, le contexte des crises s’est peu à peu modifié au cours des années 1990. Alors qu’auparavant, une grande partie de l’endettement des pays en développement se présentait sous la forme de dettes souveraines, concentrées sur un nombre limité de grandes banques, l’endettement des pays émergents a pris des formes nouvelles : la part relative de la dette souveraine et des prêts bancaires a diminué, les obligations et les produits dérivés se sont développés, et l’on constate aujourd’hui une plus grande hétérogénéité des créanciers.

Par conséquent, le rôle du « prêteur en dernier ressort » (P.D.R.) apparaît plus que jamais essentiel en cas de crise de paiement : il fournit de la liquidité en urgence aux établissements bancaires et financiers en difficulté, afin d’éviter l’effet de « dominos » et la propagation des crises entre pays. Il n’existe toutefois pas de banque supranationale, qui pourrait créer des liquidités internationales. Le F.M.I. n’est pas un vrai « prêteur en dernier ressort » car il ne peut que reprêter les liquidités mises à sa disposition par les pays membres. Il continue toutefois à s’occuper, avec plus ou moins d’efficacité, des opérations de sauvetage et de fourniture de liquidités. Il a ainsi apporté 50 milliards de dollars de liquidités au Mexique en 1995, et 30 milliards de dollars au Brésil en 2002, afin d’éviter un effondrement de ces pays qui aurait eu des effets contagieux sur l’ensemble de l’Amérique latine.

De même, en Thaïlande, en Indonésie et en Corée du Sud, la cessation de paiement n’a pu être évitée que grâce à l’intervention de la communauté financière internationale, laquelle a réussi à mobiliser très rapidement plus de 100 milliards de dollars. Toutefois cette intervention du FMI n’a pas permis de résoudre les crises ni de rétablir l’ordre des marchés.

 

Les prêts du FMI

(au 31 août 2004)

Fonds prêtables

96 milliards de dollars

Dont : prêts concessionnels

3 milliards de dollars

Encours des prêts

97 milliards de dollars à 84 pays

Dont : prêts concessionnels

10 milliards de dollars à 59 pays

 

 

Diverses solutions ont alors été envisagées. A la suite de la crise argentine, Anne Krueger, directrice générale adjointe du F.M.I., a notamment proposé de créer une procédure de faillite des Etats, laquelle permettrait une renégociation concertée entre le pays débiteur et ses créanciers sous l’égide du F.M.I. Ce projet a toutefois été mal perçu (notamment par les Etats-Unis), car il reposait sur l’idée d’un accroissement des pouvoirs du FMI (dans le but d’amener créanciers et débiteurs à négocier).

Une autre approche propose d’impliquer davantage les créanciers privés dans la prévention et à la résolution des crises.

Enfin, il convient de noter qu’en 1999, le FMI a créé un nouvel instrument de prévention des crises, le mécanisme des lignes de crédit préventives (LCP). Ce mécanisme préventif est destiné à aider les pays membres ayant une politique économique saine mais subissant des problèmes de balance des paiements du fait de la contagion financière internationale.

 

 

 

Bibliographie :

« réforme du système monétaire et financier international », Les notes bleues de Bercy, n°200, du 1er au 15 février 2001, p.1-16

Jérôme SGARD, « quelles réactions face aux crises financières ? », in Développement et mondialisation, Cahiers français n°310

site officiel du FMI : http://www.imf.org (voir notamment les fiches techniques)

 

 

 

 

Les firmes multinationales (FMN)

 

Il existait des firmes internationales avant 1945 comme par exemple l’entreprise Ford, mais elles ne réalisaient pas plus de 5 à 10% de leur chiffre d’affaires à l’étranger.

Des firmes réellement multinationales sont apparues depuis 1945, réalisant plus de 25% de leur chiffre d’affaires et parfois plus de la moitié dans des centres de production hors de leur pays d’origine. (Ex : General Motors, Exxon, IBM…).

Le terme de multinationale a longtemps été assimilé à un certain « impérialisme américain » ; parmi les 500 firmes les plus puissantes du monde, 300 étaient américaines dans les années 60. L’émergence de firmes japonaises et européennes a fait diminuer leur poids relatif : dans les années 1990, les FMN américaines ne sont plus que 150 parmi les 500 premières.

Ces multinationales sont aujourd’hui les plus grandes actrices de la globalisation, parce qu’elles unifient les marchés nationaux en un vaste marché planétaire.

 

I.                   Expansion et puissance des FMN

 

A.     un poids considérable

-Toutes les FMN ont un centre de décision unique, dans le pays d’origine. Elles sont cependant décentralisées en fonction de leurs marchés dans les pays industrialisé et du Tiers-Monde.

-Leur chiffre d’affaire est parfois supérieur à celui des Etats :

  • dans le palmarès des 100 plus grandes puissances économiques, environ la moitié étaient des multinationales.
  • Le chiffre d’affaire de General Motors est à peu près équivalent à celui de l’Indonésie.

-A la fin des années 90, 37000 FMN contrôlaient 200000 filiales et employaient environ 75 millions de salariés.

 

B.     les stratégies des multinationales : l’essor des investissements directs internationaux

 

-Les IDE sont aujourd’hui le principal instrument de pénétration de ces firmes dans les différents Etats, développés ou en voie de développement : il peut s’agir de prise de contrôle d’entreprise locale ou de création ex nihilo.

-Ils ont plutôt été stimulés par la crise mondiale : le volume d’IDE a été multiplié par 4 au cours des années 80. Cette croissance a dépassé celle du PIB, du commerce international, et de l’investissement interne.

 

1) Les investissements dans les PDEM (pays développés à économie de marché) :

-Ils représentent 80% de ces flux : les investissements se font surtout de façon croisée entre le Japon, les Etats-Unis et l’Europe.

-Les causes essentielles de ces IDE sont la recherche d’économie d’échelle et la volonté de pénétrer les marchés nationaux en contournant les barrières tarifaires et non tarifaires

 

2) Les investissements dans le Tiers monde :

-Ils obéissent à une logique de relocalisation des activités manufacturières : les FMN profitent des faibles coût de main-d’œuvre et du peu de réglementation sur le travail.

-La volonté d’étendre les marchés et de contourner les obstacles à l’exportation joue aussi.

-Les produits sont ensuite réexportés vers les pays d’origine ou bien revendu sur les marchés d’implantation, où les coûts de fabrication correspondent au pouvoir d’achat local.

-Les IDE des FMN s’orientent souvent vers les zones franches des pays en développement : Ex : Maquilladoras au Mexique, ou bien dans les « zones économiques spéciales » en Asie du Sud-Est

 

C.     Un fonctionnement en réseaux

1)      La stratégie multidomestique :

Chaque filiale vise à approvisionner le marché de son pays d’implantation : ceci est vrai en particulier des services (banques, assurance, chaîne de distribution de biens de consommation.

2)      Les stratégies « globales » :

-Un schéma consiste à spécialiser les filiales selon les compétences propres à chaque pays. Le processus  conception - production –distribution est décomposé:

-Conception et marketing dans les pays à main-d’œuvre hautement qualifiée, fabrication des composants à faible intensité technologique dans les pays à faible coût de main-d’œuvre, et assemblage dans les marchés de destination…

 

II.                Les multinationales en question

 

L’omniprésence des multinationales a suscité de nombreuses controverses dans lesquelles les arguments et les passions s’entremêlent. On peut tenter de dresser un tableau de leur inconvénient et de leurs avantages

 

A.     Les pays en développement comme les pays industrialisés les ont souvent dénoncé :

 

1) Les Etats risquent de devenir dépendants des FMN :

-Un grand nombre des décisions (création, extension, fermeture) sont prises dans des sièges sociaux très éloignés géographiquement, en fonction des seuls intérêts de la firme.

- Les multinationales peuvent aller jusqu’à peser dans les affaires intérieures d’un Etat : le rôle joué par ITT dans la chute du régime chilien en 1973 est devenu le symbole de cette capacité d’intervention dans les affaires intérieures d’un Etat souverain

2) Un rôle perturbateur :

Elles se livrent souvent à la spéculation sur les monnaies et deviennent des concurrentes dangereuses des firmes nationales, dans les pays aux marchés intérieurs encore peu développés.

-Elles profitent souvent de l’absence de législation sociale développée dans les pays d’implantation pour imposer des conditions de travail inacceptable dans les pays d’origine.

 

B.     Cependant, les FMN ont plus davantage que d’inconvénients pour les pays en développement

1) Des avantages indéniables

-Les multinationales créent des emplois, pour lesquels les capitaux locaux font parfois défaut.

-Elles favorisent les transferts de technologies et introduisent des techniques de gestion modernes.

-Les conditions de travail qu’elles appliquent, certes moins avantageuses que dans les pays industrialisés, sont néanmoins souvent supérieures aux normes locales.

-Elles lient les intérêts des Etats et atténuent ainsi la rivalité économique entre eux, ainsi que l’aurait souhaité Saint-Simon.

2) Historiquement, les FMN ont contribué au développement :

-Les pays qui ont su sortir du sous-développement (en particulier en Asie du Sud-est) sont ceux qui ont favorisé l’implantation des FMN.

Au contraire, les stratégies de développement auto-centrées ont échoué dans les pays qui ont fermé leurs frontières aux capitaux extérieurs.   

Organisations non gouvernementales

 

 

Le terme « organisation non gouvernementale » n’est pas clairement défini dans le droit international. Certes, les ONG furent consacrées par la Charte des Nations Unies de 1945, laquelle reconnaît officiellement leur existence. Sur la base de l’article 71 de la Charte, les ONG qui s’occupent de questions relevant de la compétence du Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC) et de ses organes subsidiaires peuvent se voir accorder, si elles en font la demande, un statut consultatif auprès de ce Conseil : «  le Conseil Economique et Social peut prendre toutes les dispositions utiles pour consulter les organisations non gouvernementales qui s’occupent de questions relevant de sa compétence ». La résolution 288 B du 27 février 1950 du Conseil Economique et Social précise en outre qu’une ONG est une « organisation qui n’est pas créée par voie d’accords intergouvernementaux ». Mais cette définition est imparfaite car nombreuses sont les associations et organisations qui n’ont pas le statut consultatif auprès des Nations Unies.

 

Une ONG peut donc être définie de la façon suivante : c’est une organisation indépendante des gouvernements, qui poursuit un but non lucratif sur la sphère internationale. Les ONG sont principalement financées par des dons privés, et elles sont indépendantes financièrement et politiquement. Elles agissent généralement au travers de réseaux transnationaux, tissés notamment grâce aux nouvelles technologies de l’information et de la communication.

 

Affranchies des contraintes géographiques et politiques traditionnelles, les ONG ont vu leur rôle croître sur la scène internationale depuis la fin de la guerre froide. Elles sont devenues des interlocuteurs privilégiés pour les institutions internationales, des pays les moins avancés, des gouvernements, ou des populations de territoires en guerre. Alors qu’elles n’étaient que 45 en 1945, les ONG seraient environ 38 000 aujourd’hui, 2000 étant accrédités au Conseil économique et social des Nations Unies.

 

Ce formidable essor est lié aux progrès de la démocratisation, au phénomène de la mondialisation (les problèmes sont désormais « globalisés »), mais également à une mutation dans la politique extérieure des Etats et des organisations internationales. Les institutions s’efforcent en effet de mettre en œuvre une politique d’aide au développement, qu’elles délèguent peu à peu aux ONG. Ainsi la Banque mondiale fait participer les ONG à ses programmes à hauteur de 50% (contre 5% en 1980). Par ailleurs, les ONG jouent un rôle important dans l’aide humanitaire d’urgence.

 

Le monde des ONG est très hétérogène, et il est relativement difficile d’effectuer une typologie. Elles interviennent dans divers domaines, tels que la protection de l’environnement (Greenpeace), la prévention des conflits, la lutte contre la faim, ou le respect des Droits de l’Homme, pour ne citer que les principaux axes de leurs interventions.

On distingue :

-               le mouvement de la Croix-Rouge (le premier historiquement), composé de toutes les sociétés de la Croix-Rouge (une par pays déclaré et reconnu en tant que nation), et sous la direction symbolique du CICR (Comité international de la Croix-Rouge)

-               les ONG « humanitaires », qui envoient sur le terrain des volontaires et sont directement engagées dans l’action (Médecins sans frontières, Action contre la Faim, Oxfam…)

-               les ONG qui agissent de façon indirecte, par l’intermédiaire d’autres organismes, et qui financent des projets (ce sont notamment les organisations religieuses, les Eglises…)

-               les ONG « de campagne », qui n’agissent pas directement sur le terrain de la crise mais peuvent envoyer des enquêteurs (Amnesty International, Reporters sans frontières…).

 

Par ailleurs, les ONG ont différents modes d’actions. Certaines sont avant tout des groupes de pression politique, tandis que d’autres mettent en place des programmes d’aides (éducatives ou caritatives par exemple).

 

Bénéficiant d’une médiatisation croissante de leur action, de plus en plus riches (pour certaines d'entre elles), les ONG ont acquis un pouvoir jugé parfois exorbitant, et on leur attribue une influence décisive sur la scène internationale. Pour beaucoup d’auteurs, elles constituent l’incarnation de la « société civile internationale » (même si l’on oublie que la plupart d’entre elles n’exerce le plus souvent qu’un rôle marginal). Les ONG ont peu à peu appris à coordonner leur action, et elles jouissent d’un réel prestige moral, du fait notamment de leur indépendance à l’égard des gouvernements. Les ONG ont par exemple exercé une forte influence lors de la signature de la Convention d’Ottawa (1997, entrée en vigueur le 1er mars 1999 : lutte contre les mines antipersonnelles) ou lors de la Convention de Rome du 17 juillet 1998 instituant la Cour Pénale Internationale.

 

Toutefois, dans un contexte général de diminution de l’aide publique au développement, à l’heure de la mondialisation (qu’elles combattent pour nombre d’entre elles), les ONG sont aujourd'hui confrontées à de nombreuses questions. Ces interrogations portent sur leur fonctionnement et leur nature même : leur financement, leurs moyens d'action, leurs relations avec les pays du Sud, le partenariat avec les entreprises privées, leur rôle et leur légitimité face aux autres acteurs des relations internationales… Se pose notamment la question de l’ingérence humanitaire, qui privilégie la légitimité de la solidarité humaine au principe de souveraineté nationale.

 

S’il convient donc de relativiser l’influence des ONG, il n’en reste pas moins qu’elles sont devenues des acteurs importants sur la scène internationale, et qu’elles auront un rôle majeur à jouer dans les années à venir, aux côtés des Etats (et non contre ou sans eux), dans l’espace progressivement abandonné par le politique.

 

Les inégalités de développement aujourd’hui

 

  • On mesure les inégalités de développement de différentes manières :
    • Le produit intérieur brut (PIB) est la somme des valeurs ajoutées produites à l’intérieur d’un territoire en une année. Il est souvent divisé par la population pour donner le PIB par habitant. Le produit national brut (PNB), lui, prend en compte la nationalité des agents économiques et non le critère territorial.
    • Ces indicateurs sont plus révélateurs lorsqu’ils sont estimés en parité de pouvoir d’achat c’est-à-dire en tenant compte du niveau et de l’évolution des prix dans le pays.
    • L’indice de développement humain (IDH) conçu par les experts de l’ONU dans le cadre du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) prend en compte trois données: l’espérance de vie à la naissance, le degré d’éducation et l’accès aux ressources monétaires pour avoir un niveau de vie décent. Il varie de 0 à 1 des pays les moins développés aux plus développés.
    • L’indice de pauvreté humaine a été créé en 1997 par le PNUD. Il faut distinguer pauvreté absolue (ne pas pouvoir subvenir à ses besoins) et pauvreté relative (être beaucoup plus pauvre que les autres).

 

  • Les inégalités en terme de PNB sont considérables : l’Ethiopie avait un PNB de 100$ par habitant en 1998 contre 40.080$ pour la Suisse. Les plus faibles PNB par habitant se situent en Afrique noire (Mozambique, Burkina Faso) et en Aise (Vietnam, Laos).
  • L’IDH permet de dresser un tableau des niveaux de développement à l’échelle mondiale :
    • Au dessus de 0,900 se trouvent les Etats-Unis et le Canada, l’essentiel des pays d’Europe occidentale, le Japon, la Corée du Sud l’Australie et la Nouvelle-Zélande, suivis par l’Argentine, du Chili, des pays d’Europe centrale et de certains petits pays exportateurs de pétrole,
    • Entre 0,700 et 0,799 se trouvent l’essentiel de l’Amérique latine, l’Europe orientale ainsi que la Russie, la Chine et une grande partie des pays du Moyen-Orient,
    • Le reste des pays a un IDH inférieur à 0,700 et l’Afrique noire est particulièrement en retard puisque parmi les 35 pays dont l’IDH est inférieur à 0,500, 29 se situent en Afrique noire.
  • En terme de pauvreté absolue, on constate que 2,8 milliards de personnes vivent avec moins de 2 dollars par jour, et 1,2 milliard avec moins de 1 dollar par jour dont 800 millions en Asie du Sud et de l’Est. La proportion de pauvres est toutefois plus élevée en Afrique subsaharienne qu’en Asie.

 

  • Parmi les pays sous-développés a été créée la catégorie des pays les moins avancés (les PMA) qui constituent depuis 1971 un groupe défini par l’ONU essentiellement caractérisé par la faiblesse de son revenu par tête. Ils étaient au nombre de 49 en 2001, dont 34 en Afrique.
  • La notion de Tiers monde a été introduite par Alfred Sauvy en 1952 pour caractériser essentiellement les nouveaux pays nés de la décolonisation, qui se sont affirmés au niveau international au travers de la conférence de Bandoung en 1955 et de la première conférence des non-alignés à Belgrade en 1961. Si ces pays ont encore des caractéristiques communes (forte croissance démographique, économie dualiste, importance de l’agriculture dans le PNB, chômage élevé), l’apparition des PMA montre que ce que l’on pouvait appeler le Tiers monde au moment de la charte d’Alger de 1967, adoptée par un « groupe des 77 » pays en voie de développement, est aujourd’hui un ensemble très disparate composé à la fois de pays dont l’écart de développement se creuse avec les pays développés et d’autres en rattrapage économique, notamment les nouveaux pays industrialisés (NPI). Ainsi, le « groupe des 77 », qui regroupe aujourd’hui 133 pays en voie de développement, n’est plus aussi représentatif au sein de l’Assemblée générale de l’ONU, bien que ces pays y soient encore majoritaires. D’autre part, les situations économiques peuvent être très variables pour un même niveau de développement, ainsi par exemple entre les pays de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et ceux n’en faisant pas partie.

 

  • Au-delà des problèmes d’espérance de vie, de niveau d’éducation et de ressources monétaires, les pays en voie de développement font aujourd’hui face à des problèmes spécifiques qui freinent leur développement tels que l’instabilité politique, essentiellement marquée en Afrique, l’expansion démographique, le chômage, qui traduit la sous-utilisation de la force de travail disponible, le problème des structures agraires et la persistance du problème alimentaire.

 

 

L’aide aux pays en développement

 

Que reste-il aujourd’hui de l’aide au développement ? Faut-il changer la nature de l’aide ?

 

I.                   L’aide multilatérale

 

1) Les organisations apparentées à l’ONU

Créées en 1946, les plus importantes interviennent dans le domaine de la santé (OMS), de l’éducation et de la culture (UNESCO) l’aide à l’enfance (UNESCO). D’autres sont plus récentes, comme le programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) adopté en 1965. Il est chargé d’apporter aux pays du Tiers monde l’aide financière et technique nécessaire à  la mise en valeur de leur ressources nationales. Il est assisté par l’ONUDI, Organisation des Nations Unies fondée en 1966 pour le développement industriel.

a)      Dans le domaine alimentaire et agricole :

L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) aide les pays du Sud par la livraison de produits agricoles et apporte une assistance technique contribuant au développement de leur production.

-La FAO a lancé en 1960 une campagne mondiale contre la faim, puis le programme alimentaire mondiale (PAM) dans le cadre duquel une aide alimentaire est distribuée en cas de désastre naturel (Ex : sécheresse dans le Sahel en 1973-1974)

-Enfin, la FAO a patronné la « Révolution verte » en aidant à introduire dans les pays en développement des variétés de céréales à haut rendement.

-Enfin, en 1974, elle a participé à la création du FIDA (Fonds international de développement agricole, qui accorde des prêts à très bas taux d’intérêt pour accroître la production agricole des pays du Sud.

b)      Dans le domaine financier :

La Banque Mondiale utilise son capital souscrit par 177 pays membres et le produit des emprunts qu’elle contracte pour accorder des prêts à long terme (15 ou 20 ans), afin de financer la politique de développement des pays du Sud. Parmi ses filiales, L’AID (association internationale de développement) accorde pour 35 à 40 ans des crédits sans intérêt, strictement réservés aux pays les plus pauvres.

c)      Dans le domaine commercial :

La Conférence des Nations Unis sur le commerce et le développement (CNUCED) a été instituée en 1964 afin d’améliorer les conditions d’échange des PED et de substituer à la relation de donateurs à assistés la formule « trade not aid ». Le but de la CNUCED était de remédier à la dégradation des termes de l’échange en assurant aux produits bruts exportés par les pays du Tiers monde des débouchés élargis : par l’abaissement des droits de douanes notamment. Près de dix conférences se sont tenues sans aboutir à un accord qui satisfît les pays du Sud.

 

2)      Les organisations des pays développés

La CEE a signé en 1975 la convention de Lomé avec 46 pays (aujourd’hui 68) d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP). Elle a été renouvelée en 1979 (Lomé 2), en 1984 (Lomé 3)  et en 1989 (Lomé 4 qui s’étend sur dix ans jusqu’en 1999). Cette dernière à créé une aide à l’ajustement structurel. Et a porté l’enveloppe financière à quelques 10 milliards de dollars.

-Les conventions prévoient le libre accès des produits aux marchés du Nord sans réciprocité obligatoire

-Dans le cadre de ces conventions, les accords STABEX et SYSMIN visent à garantir les recettes d’exportation des pays ACP en stabilisant les prix des produits agricoles et miniers.

-Les accords de Cotonou ont pris le relais des conventions de Lomé après 1999 : afin que l’aide soit mieux utilisée, celle-ci est davantage conditionnée à des projets de développement précis (infrastructures, éducation, santé…)

 

II.                L’aide au développement, des résultats décevants

 

1)      Des attentes déçues

a)      Une aide bilatérale insuffisante :

-Les objectifs fixés par la CNUCED n’ont pas été suivis : En 1968, à New Delhi, elle proposait que l’aide publique au développement (APD) s’élève à 1% du PNB des pays développés. En 1972, à Santiago, elle revoyait ses ambitions à 0,7% du PNB.

- Mis à part quelques pays comme la Suède (1,05%), le Danemark (1,03%) la Suède (0,90%), où les Pays-Bas (O,76%), la contributions des pays développés relativement à leur PNB est restée très inférieure aux objectifs fixés par la CNUCED, ne s’élevant pas à plus de 0,3% du PNB.

-La France est à 0,36% du PNB (en 2002). L’aide des Etats-Unis s’élève à 0,19%

b)      Une aide parfois mal orientée :

-efficacité de l’aide compromise par la méconnaissance des spécificités des milieux naturels et humains du Tiers-Monde. Par exemple privilégier le développement industriel avant le développement agricole

-L’aide a souvent été détournée de son objet par les élites corrompues, ou bien au profit de dépenses somptuaires et militaires.

-Seulement 0,01% du PNB des donateurs est consacré à l’APD dite humaine, c’est-à-dire concernant la formation et l’éducation.

-L’aide à alourdit l’endettement des pays du Sud ;

 

2)      Le problème de l’endettement

Après la crise de la dette en 1982, qui consacre le défaut de paiement du Mexique, des efforts ont été déployés pour remédier au surendettement des pays du Sud.

a) L’annulation de certains remboursements pour les pays les plus pauvres

-100 milliards de dollars entre 1988 et 1995 ont ainsi été annulés.

-La suspension des paiements par certains pays débiteurs n’a pu être que temporaire sous peine de sanction sévère, notamment l’impossibilité d’obtenir de nouveaux crédits.

b) Le rééchelonnement des dettes :

-Obtenu par des accords entre pays débiteurs et créanciers : « club de Paris » pour les emprunts d’Etat ou « club de Londres » pour les prêts des banques commerciales.

-Des allégement du service de la dette d’au moins un tiers ont été consentis dans les années 80

c) L’attribution de nouveaux crédits :

-Afin de permettre le remboursement en relançant la croissance par de nouveaux crédits.

-C’est le sens du plan Baker en 1984. Il s’agit globalement d’un échec en raison de la réticence des banques commerciales

       d) L’allègement de la dette :

-En 1989, le plan Brady vise à alléger la dette vis-à-vis des banques commerciales:

-Par la transformation des dettes en obligation « titrisation » des créances bancaires avec garantie du trésor américains.

-Par la transformation des dettes en investissement : conversion des dettes en actions

 

Les résultats : La gestion de la dette du Tiers monde a permis d’éviter une crise financière majeure. Le service de la dette de ces pays est passé de 30% de la valeur de leurs exportations en 86 à 15% en 1995.

 

3)      Ainsi, les flux d’aide au développement ont connu de fortes évolutions

a) Avant « la Crise de la dette », les fonds privés se dirigent massivement vers les pays du Sud : recyclage de pétrodollars auprès des nouveaux producteurs qui s’endettent… L’APD est alors dirigée vers les pays les plus pauvres, majoritairement en Asie (45%), puis en Afrique (25%)

b) Après la Crise de la dette, les financements privés, suite au défaut de paiement du Mexique, fuient le Tiers Monde, remplacés par la montée des financements publics.

En moyenne, pendant les années 80, croissance de 2,5% par an de l’APD. En 1992 : 60mds de $

L’aide se redirige désormais vers l’Afrique subsaharienne, avec le décollage de nombreux pays asiatiques.

c) la tendance se renverse au début des années 90.

-Les financements privés reprennent vers les pays du Sud qui réussissent : Asie (Chine, Dragons, Tigres…), et Amérique du Sud principalement, sous forme d’investissements directs. En revanche, les PMA, et l’Afrique en particulier, font toujours fuir les investisseurs privés.

 

Les financements publics baissent parallèlement: (-3,5% en 91 et 92, - 10% en 93 !) pour cause de:

  • Mauvaise utilisation de l’aide, de l’échec des ajustements structurels prônés par le FMI, lassitude devant peu de résultats.
  • L’effondrement de l’aide de l’ex-Union soviétique, des pays Arabes.
  • La Concurrence des pays de l’Est, de l’Afrique du Sud « nouvelle ».
  • Tendance à privilégier l’aide d’urgence humanitaire.

Les financements publics se font aujourd’hui davantage sous forme de dons (90% APD entre 1995 et 2000)

 

 

III.             Aujourd’hui, la place à nouveau centrale du développement dans les débats internationaux

 

1)      La prise de conscience internationale de l’importance du thème du développement dans un contexte de mondialisation

En témoigne une succession de conférences qui ne se traduisent qu’assez peu dans les faits :

- Conférence de  Doha (négociations appelées « cycle du développement ») (nov. 2001).  Sommet du millénaire des Nations unies. Conférence internationale sur le financement du développement à Monterrey (mars 2002). Sommet mondial sur le développement durable à Johannesbourg (Sept. 2002). Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) en 2001

-Malgré une légère hausse de l’APD en 2001-2002, ces conférences reflètent surtout le temps nécessaire à l’émergence d’un nouveau modèle des relations Nord-Sud, adapté à l’après-guerre froide et à la mondialisation

 

2)      Vers un nouveau modèle de l’aide face à la mondialisation?

Avant, l’aide au développement se faisait pour trois raisons : 1) intérêts diplomatiques et géopolitiques (Guerre froide), 2) recherche d’avantages commerciaux et 3) altruisme d’inspiration humanitaire et historique.

Avec la fin de la guerre froide, un nouveau modèle se forme autour de trois piliers :

a) La notion de biens publics mondiaux : basée sur la reconnaissance d’intérêts communs

-empêcher que les « failed states » menacent l’équilibre mondial ; l’Afghanistan depuis le 11 sept.

-protection de l’environnement, lutte contre les pandémies, développement durable…

b) la réduction de la pauvreté : inspiration humaniste renforcée par la mondialisation et la montée en puissance d’opinion publiques globalisées. Ex : le Congrès américain sensible à la protection des enfants

c) L’insertion des PVD dans le cadre commercial multilatéral organisé par l’OMC : Depuis l’Uruguay Round, PVD cherchent à s’insérer. En contrepartie, on attend des pays développés qu’ils ouvrent leurs marchés, en particulier agricole, où les PVD ont encore un avantage comparatif : BM estime à 100 mds $/an le coût des barrières douanières agricoles pour les PVD (2x plus que l’APD) !

 

 

Bibliographie :

Ramsès 2003 : L’aide au développement dans la gouvernance globale par Pierre Jacquet

Le Sud dans la nouvelle économie mondiale, Sylvie Brunel, PUF

L’économie mondiale depuis la fin du XIX°  siècle, A. Gauthier, Bréal

 

 

 

 

 

 

Phénomènes migratoires

 

L'espace mondial se présente aujourd'hui comme un système marqué par la multiplication de flux de toute nature (hommes, marchandises, capitaux, informations) qui ont des effets sur les sociétés. Ces flux sont organisés par des acteurs spatiaux comme les États, les entreprises multinationales, les organisations internationales, les organisations non gouvernementales, les organisations illicites. L'intensité de ces échanges favorise l'émergence de lieux de la mondialisation à différentes échelles, notamment les métropoles mondiales qui disposent d'un pouvoir de commandement. Les processus de mondialisation mettent en relief la manière dont les démographies régionales interagissent les unes sur les autres et deviennent interdépendantes.

 

I.                         Les causes de la migration

     

La question des motivations de départ est au centre du débat actuel sur les réfugiés et les demandeurs d’asile. Un choix aussi important, aussi difficile que celui de quitter son pays, de perdre, même temporairement, ses racines, ses attaches familiales ou amicales, son cadre de vie, ne se fait pas à la légère. Il existe souvent une ou plusieurs raisons graves ou fortes à la décision de partir. On le fait généralement par nécessité intérieure et extérieure, et plus souvent par urgence.

Il est possible de distinguer les facteurs principaux de la migration :

·              Migrations spontanées (sans contrôle étatique ou planification préalable par des instances économiques ou étatiques comme c'était le cas dans les années 50-60)

·              « partir ou mourir » : pour de nombreuse populations, le dilemme est tragiquement simple : catastrophes naturelles (inondation au Bangladesh, sécheresse au Sahel ), disettes  alimentaires dans la Corne de l’Afrique (Somalie, Ethiopie, Soudan), génocides, guerres civiles avec ou sans interventions étrangères…

·              Migrations économiques : Les motivations économiques sont classiquement à la base des migrations internes et internationales. Différence dans la situation de l’emploi, écarts de revenus, le niveau de vie très bas, espoirs de gains plus rapides à l’étranger constituent les ressorts de ces migrations économiques, qui constituent 35 à 40% des migrations internationales.

·              Les migrations pour les études : les migrations pour le savoir et la formation sont une forme importante et souvent mal connue de ces flux internationaux. Selon Ch. Halary (1998) il y a plus de 1.2 million d’étudiants expatriés à travers le monde.

·              Les migrations familiales (la famille accompagne le chef de ménage lors de son premier départ à l’étranger).

 

II.                      Flux migratoire des personnes

 

Selon l'Organisation des Migrations Internationales, en 2000, 150 millions de personnes vivent hors de leurs pays ; en 1975, l'ONU en recensait 75 millions. Selon ces statistiques, le nombre de personnes migrantes s'accroît tous les ans de 2.5 %.

Les spécialistes distinguent les migrations et les déplacements à travers un critère temporel et sociologique, en ceci que les migrations constituent des mouvements géographiques de personnes dans le but d'une installation dans un autre pays (autrement dit un déplacement considéré à plus ou moins longue échéance comme définitif), tandis que les déplacements constituent des situations extrêmement diverses, précaires, où se retrouvent pour la plupart des fois des personnes en situation de migration forcée, voir de fuite. En effet la question des réfugiés détermine aussi la façon dont les Etats appréhendent ces flux de migrations complexes.

Le trait important de la migration contemporaine est la bipolarité des flux, c’est-à-dire le pays  peut être en même temps pays d’accueil et pays de départ comme l’Angleterre et les Etats-Unis, qui sont de grands pays d’accueil mais également de départ (respectivement pour l’Australie et le Canada). Outre les Etats-Unis, les pays d’accueil importants sont l’Allemagne (5.242 mil.), la France (3.608 mil.), l’Angleterre (1.87 mil.), Suisse (1.1 mil.), Belgique (0.905 mil.), l’Italie (0.781 mil.), Pays-Bas (0.692 mil.).

De plus, il faut souligner l’existence du problème de la fuite des cerveaux et du drainage des élites. Dans le domaine de la matière grise et du talent, il existe une véritable concurrence au sein de ce marché mondial où les plus grandes sociétés et les Etats les plus riches se disputent les savants, les meilleurs scientifiques, les grands ingénieurs, les managers, les experts financiers mais aussi les artistes les plus talentueux, les sportifs de grande classe.

 

III.                   Les flux migratoires liés au commerce

 

Grâce à la migration contemporaine intense, il est possible de comparer l’importance des flux commerciaux  avec les investissements mondiaux. L’aspect financier des migrations de travail est l’un de ceux auxquels les Etats d’émigration et d’immigration accordent le plus d’intérêt en raison des incidences sur la balance des paiements et les réserves de change.  Selon différentes sources  nationales et internationales (Banque mondiale, OMC), les envois de fonds, les ‘’remises’’ au niveau mondial sont passés de 3 milliards de dollars en 1970 à 35 milliards de dollars en 1981, 75 milliards de dollars en 1994. Ils sont constitués des paiements aux hommes d’affaires non-résidents (les plus grands aux Etats-Unis, Suisse, l’Allemagne, l’Italie, Japon et Belgique). De plus, on multiplie les revenus des pays par les taxes pour les entreprises qui s’occupent du placement à l’étranger ; en outre il faut mentionner les investissements des émigrants à l’économie de son pays d’origine et la réduction des frais sur l’éducation et sécurité sociale.    

Il est nécessaire de noter que quelques flux commerciaux sont liés aux flux migratoires. Il est traditionnel dans les migrations internationales de travail que les émigrés rapportent à leur famille des cadeaux et toutes sortes de produits, mais cette tradition a pris dans certains pays les formes d’un véritable système de distribution commerciale. Ainsi, des circuits très structurés sont organisés avec regroupement des demandes dans telle région algérienne, achat en France et déplacements de migrants qui jouent un rôle d’intermédiaires entre les deux pays. Ces transferts de biens sont également importants entre les Etats pétroliers du Moyen-Orient et les principaux pays d’origine : Egypte, Jordanie, Yémen, Pakistan, Inde, Philippines, de même qu’entre les Etats-Unis, le Mexique ou Haïti.

 

 

Santé et environnement

 

  • Si les enjeux environnementaux et sanitaires sont liés, et se posent naturellement au niveau mondial, comme le montre par exemple la catastrophe de Tchernobyl en 1986, ils opposent toutefois les pays développés et les pays en voie de développement qui estiment que leur niveau de développement ne leur permet pas de se préoccuper de manière prioritaire de ces enjeux. Or, faute de progrès techniques, les pays pauvres recourent à la déforestation et à la surexploitation des terres qui provoque l’érosion des sols ce qui porte atteinte à leurs perspectives de développement. Les mécanismes internationaux de protection de l’environnement ont donc du mal à se mettre en place, bien que l’on dénombre près d’un millier de convention internationales bilatérales ou multilatérales à ce sujet.
  • Ces conventions ont notamment été adoptées lors de grandes conférences internationales organisées récemment pour remédier à ces lacunes, mais les mesures décidées sont rarement effectives :

-         1972 : conférence de Stockolm,

-         1975 : convention internationale sur le commerce des espèces menacées,

-         1979 : première conférence mondiale sur le climat à Genève,

-         1992 : « Sommet de la Terre » à Rio, organisé par la CNUCED, qui a adopté l’ « Agenda 21 », comportant des mesures précises visant à la protection de l’environnement, et notamment la reconnaissance au niveau international du principe de précaution,

-         1992 : Convention sur la diversité biologique (CDB),

-         conférence de New-York en 1997 qui constate l’échec de la mise en place des mesures évoquées à Rio,

-         1997 : conférence à Kyoto qui a donné lieu au Protocole de Kyoto, comportant des mesures précises telles que la réduction de 5,2% des émissions de gaz à effet de serre en 2012,

-         2000 : conférence de La Haye qui constate l’échec de l’application du Protocole de Kyoto, notamment du fait que le principal pollueur mondial selon l’Agence internationale de l’énergie, les Etats-Unis, ne l’a pas ratifié et ne l’applique donc pas,

-         Sommet du millénaire à New York en 2000 et adoption des objectifs du millénaires qui incluent notamment la réduction de la mortalité infantile, la lutte contre le SIDA et le paludisme et les question d’environnement durable telles que l’accès à l’eau potable.

 

  • Les questions de santé et d’environnement sont toutes deux en jeu dans la perspective du réchauffement de la planète. Le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) et l’Organisation météorologique mondiale ont fondé un groupe d’experts qui prévoient un réchauffement de la planète de 1,5 à 6 degrés d’ici à 2010. Les risques de cette évolution portent essentiellement sur la préservation de l’écosystème et la biodiversité, mais la coopération internationale à ce sujet reste faible.

 

  • Les problématiques de la santé et de l’environnement au niveau international sont aujourd’hui intégrées dans la notion de développement durable, introduite en 1987 par le Rapport Brundtland, Our common future. La dernière conférence en date sur les questions environnementales a eu lieu à Johannesburg en 2002 et a porté sur la notion de développement durable. Elle fut aussi un échec relatif, avec notamment la renonciation au principe du « pollueur-payeur » et l’absence de l’introduction de critères environnementaux dans les décisions de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
  • Or, le rôle de l’OMC en matière de santé et d’environnement est essentiel, comme le montre la question de l’accès des pays pauvres aux médicaments mis au point contre certaines pathologies dans les pays développés. Le débat s’est cristallisé sur la question des traitements du virus du SIDA.
  • Aujourd’hui, il y a 34 millions de séropositifs dans le monde, dont 28 millions en Afrique noire et 4,2 millions en Afrique du Sud, soit 20% de la population. Or, les thérapies mises au point sont excessivement chères et protégées par des brevets, dont les enjeux financiers sont importants. Le risque que pouvait comporter l’accès par les pays pauvres à des médicaments génériques concernant le SIDA résidait dans la possibilité que ces traitements soient ensuite réexportés vers des pays développés où ils sont beaucoup plus chers, mettant ainsi en péril la survie financière des laboratoires médicaux mondiaux, notamment américains.
  • Un compromis a finalement été trouvé lors de la conférence de Doha en 2001 dans le cadre des ADPIC (ou TRIPs), Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, permettant à tous les pays de produire et distribuer des médicaments à leur population, quels que soient les brevets qui les protègent.
  • Au-delà de la catastrophe humaine, les conséquences du virus du SIDA pour les économies des pays en développement sont dramatiques, puisqu’il provoque une perte de la main d’œuvre et des qualifications nécessaires au développement.

 

  • L’Organisation mondiale de la santé (OMS), organe des Nations unies créé en 1948 avec pour objectif un niveau de santé toujours plus élevé, n’a pas réussi à prévenir la dégradation des niveaux sanitaires des pays en voie de développement. L’écart s’est au contraire creusé avec notamment la réapparition de maladies anciennes telles que la tuberculose ou la diphtérie.

·        L’OMS est aujourd’hui critiquée pour son fonctionnement coûteux et bureaucratique. Le mécanisme international de lutte contre le SIDA s’est d’ailleurs élargi avec la création en 1996 du Programme commun des Nations unies sur le VIH/SIDA (ONUSIDA) qui regroupe différents acteurs tels que l’UNICEF et le PNUD.

  • Toutefois, certaines réussites ont été réelles avec la disparition de certains virus et la gestion récente de la crise du SRAS en Asie. Malgré 800 morts, l’alerte de l’OMS et la coopération des Etats ont permis d’endiguer l’épidémie.

 

  • Enfin, les questions environnementales ont aussi des conséquences sur les conflits mondiaux. Notamment, l’enjeu de l’accès à l’eau potable qui crée des conflits entre les pays partageant les cours d’eau, par exemple entre la Turquie, la Syrie et l’Irak à propos de l’Euphrate ou encore entre Israël, la Jordanie, le Liban et la future Palestine en ce qui concerne le Jourdain.

 

 

 

 

La criminalité internationale à l’heure de la mondialisation ?

 

I.                   Les organisations criminelles et terroristes dépassent le cadre étroit de l’Etat-nation

 

A.     Les organisations criminelles : un phénomène désormais international
1) Des mutations importantes ont eu lieu au cours des dix dernières années

La fin de la Guerre froide a entraîné une « balkanisation » de la planète : la naissance de petits Etats faibles permet aux organisations criminelles de s’y implanter plus facilement. Ces « zones grises », où l’Etat est trop faible pour assurer le maintien de l’ordre, deviennent des bases criminelles.

Ceci est illustré par l’exemple de l’Albanie et du Kosovo : Quand l’armée de libération nationale du Kosovo, l’UCK, a pris le pouvoir, son expérience de la clandestinité à favorisé la mise en place de trafic et de réseaux de prostitution… De même en Russie, l’effondrement du communisme a permis aux élites corrompues de s’emparer frauduleusement du pouvoir économique. L’absence de régulation a favorisé les pratiques mafieuses (Ex des oligarques russes). 

 

2) Les organisations criminelles se sont elles-aussi mondialisées

-On assiste à un essor sans précédent du trafic des stupéfiants dans le monde :

220 millions de consommateurs de drogues dures. Elles représentent 8% commerce mondial en valeur (Source : PNUCID). Des zones de production localisées irriguent le marché mondial : Triangle d’Or (Laos, Birmanie, Thaïlande, Chine), le Croissant d’Or (Pakistan Afghanistan) et la Colombie (75% cocaïne mondiale) et le Pérou

-  Les organisations criminelles instrumentalisent la mondialisation:

-         Elles élaborent désormais des stratégies à l’échelle globale : le blanchiment d’argent est facilitée par la libération des mouvements de capitaux. Un rapprochement entre la criminalité organisée et la délinquance économique financière s’est opéré.

-         Des activités criminelles se développent à la faveur des migrations internationales. Ex : Les passeurs entre le Mexique et les Etats-Unis, trafics de drogues

-         Les organisations criminelles traditionnelles disposent d’une diaspora utile qui fonctionne en réseaux : Ex : Chinois aux Etats-Unis reliés aux fameuses « triades » de l’Empire du Milieu

- Malgré une organisation traditionnelle, les organisations savent s’adapter aux évolutions modernes :

-         Elles s’avent exploiter les activités traditionnelles et nouvelles : jeux, prostitution, extorsion de fonds, stupéfiants et trafic de tabac, récupération de déchets toxiques, piraterie, mais aussi la cybercriminalité (modification de programmes comptables, contrefaçon de carte bancaire et achats Internet…)

 

B.     La nouveauté d’un terrorisme global depuis le 11 septembre

1) le terrorisme est le fait de réseaux.

Al Quaida : organisation souple comme celle du capitalisme, utilise de techniques modernes, comme internet. Elle serait allée jusqu’à la spéculation boursière à la baisse en prévision des attentats du 11 septembre.

-Ce terrorisme est global dans son recrutement : anciens combattants d’Afghanistan

-Il fait une utilisation novatrice des média et des procédés de communication.

 

2) Un espace d’intervention et une ambition mondiale

Les mouvements terroristes classiques avaient pour but la prise de pouvoir dans un seul pays. Le combat est ici une croisade. Aucune discussion n’est plus possible.

3) Mais la nécessité d’un Etat pour se construire demeure

Dans le cas d’Al Quaida : Soudan puis Afghanistan, Etats soumis à la logique du jihad anti-américain. Classiquement, l’Etat soumettait les terroristes à leur logique. Ici, c’est l’inverse

 

C.     Le blanchiment d’argent et les centres financiers offshore

1) Le blanchiment classique est caractérisé par une diversité extrême de moyens. Ex : Faux procès, fausses adresses minitel, parcellisation des comptes bancaires pour encaisser de petites sommes, casinos….

2) Les centres financiers offshore représentent cependant la majeure partie du blanchiment:

-         Estimation du FMI : Entre 500 et 1500 milliards de dollars sont ainsi recyclés chaque année. Cet argent provient « surtout du trafic de stupéfiants, de la fraude fiscale,des détournements de fonds de l’UE, de la fraude à la TVA, des faillites frauduleuses, et de l’escroquerie faites aux assurances… »

-         Le système empêche toute traçabilité des fonds : faute de pièces à conviction, les juridictions nationales sont impuissantes. Les centres offshore proposent : le secret bancaire, une fiscalité avantageuse, la présence de conseil juridique pour échafauder des montages financiers protecteurs : sociétés écrans…. Chaque centre a une spécialité. Il existe même des guides : « Comment choisir son paradis fiscal ?

-         D’après le forum de stabilité financière : il existe 42 centres offshore, 70 d’après le GAFI. Le nombre est en hausse. Les actifs totalisent plus de 3% PIB mondial, plus de 5000 milliards de $.

 

II.                Une lutte devenue mondiale

La lutte a commencé avec la menace que faisait peser le poids financiers des cartels colombiens (Medellin, Cali). Elle a été renforcée après le 11 septembre, notamment par la prise de conscience du poids financiers des organisations criminelles et terroristes.

 

A.     Le cadre de l’Etat nation paraît trop étroit pour lutter efficacement contre des organisations internationales

 

-Appel de Genève en 1996 : Sept magistrats européens dénoncent la non coopération judiciaire en matière pénale ; il faut rouvrir l’enquête à chaque passage de frontière. Ils demandent :

-transmission directe des pièces d’exécution

-levée du secret bancaire en matière pénale

-la disparition de l’exception fiscale, surtout en Europe.

-le renforcement de la coopération internationale

 

B.     La création d’un arsenal juridique international

1) Au niveau international :

-Création en 1989 du GAFI : Groupe d’action financière internationale sur le blanchiment des capitaux, institué par le G7.

- recommandation du GAFI dans la convention du Conseil de l’Europe (1990)

2) Au niveau européen :

-1991 : Première directive européenne sur l’utilisation du système financier contre le blanchiment.

-Création d’Europol (juillet 1995) : L’agence n’a pas de pouvoir d’investigation mais fournit des analyses opérationnelles  et joue un rôle de coordination des différentes polices nationales.

-Projet de création de l’équivalent judiciaire d’Europol : Eurojust. (2001)

-Création d’un mandat d’arrêt européen en 2001.

C.     Mais les centres offshore continuent de constituer un point faible de cette stratégie anti-fraude

 

Des difficultés politiques entrave la lutte contre les paradis fiscaux :

1) La mondialisation : la libre circulation des capitaux est une condition de l’ouverture commerciale des PVD. Les centres financiers offshore se réclament cyniquement des principes libéraux du FMI… : tensions Nord-Sud. Pour ne pas se mettre en règle, ces centres offshore revendiquent leur souveraineté nationale.

 

2) Les pays du GAFI qui se réclament de la lutte contre le blanchiment ont eux-mêmes recours au centres offshore…

a)Ex : contrat d’armement, pour rendre invisible le contrat dans la balance des paiements. 

b) Ou pour activité moins « sensibles » : Les gouvernements l’acceptent de leurs entreprises pour favoriser leur compétitivité. Ex : inscrit dans le code des impôts américains (section 921-927 US internal revenu code). Condamné par l’OMC.

c) Utilisés par les services secrets de certains pays pour financer des guérillas ou des partis d’opposition…

(Rapport Peillon Montebourg 2002)

 

 

 

 

Bibliographie :

Ramsès 2001 : Les puissances criminelles, une authentique question internationale, Thierry Cretin

Ramsès 2003 : Terrorismes, une rupture historique, Michel Wieviorka

                         Mécanique et géopolitique du blanchiment de l’argent, Jean-François Thony

 

 

L’altermondialisme

 

Les dix dernières années ont vu le développement de forts mouvements de contestation de la mondialisation, tant au sein des opinions publiques que dans le cadre d’associations et d’organisations spécialisées. Certains ont voulu ne voir dans ces mouvements, parfois tentés par la radicalisation, qu’un phénomène éphémère. Les évènements du 11 septembre 2001 ont semblé confirmer cette impression, la contestation s’éclipsant brièvement face à la menace terroriste. Mais cette dernière s’est peu à peu restructurée autour de nouveaux thèmes comme la dénonciation de l’intervention américaine en Afghanistan puis en Irak, et elle s’est progressivement constituée en véritable interlocuteur, tant des gouvernements que des organisations internationales.

 

Bref historique

En 1994 apparaît une guérilla menée par les zapatistes au Chiapas sous l’égide du sous-commandant Marcos. Ce soulèvement zapatiste (déclenché le jour de l’entrée du Mexique au sein de l’ALENA), et la rencontre internationale organisée au Chiapas, durant l’été de 1996, eurent un retentissement mondial. Par ailleurs, de nombreuses protestations émergent aux Etats-Unis contre l’ALENA (en 1993), et la grande manifestation contre le cycle de l’Uruguay (à New Dehli en 1994) rassemblait 200 000 personnes. Enfin, les grèves du secteur public en France en 1995 ont pu être décrites comme « la première révolte contre la mondialisation » (Erik Izraelewicz, le Monde du 7 décembre 1995).

Mais ce sont les manifestations organisées à Seattle (environ 50 000 personnes) en novembre 1999 lors de l’assemblée générale de l’OMC qui ont signé le début d’un cycle ininterrompu de mobilisation à l’échelle planétaire. Depuis lors, toute conférence internationale s’accompagne de manifestations et de conférences parallèles. Forum de Davos, rassemblement à Gênes en 2001 contre le sommet du G8 (200 000 manifestants, et mort d’un manifestant abattu par la police italienne), premier Forum Social Européen à Florence en novembre 2002, défilés (entre 450 000 et un million de personnes) contre la guerre en Irak… l’utilisation des nouvelles technologies a énormément facilité la diffusion des messages et la coordination des actions. Mais peut-on pour autant parler d’un mouvement altermondialiste ? Certes, les groupes contestataires réussissent à agir de concert pour bloquer les négociations commerciales : mais ce mouvement est-il réellement structuré ?

 

Un mouvement hétéroclite

L’altermondialisation regroupe des personnes d’horizons très divers (anarchistes, tiers-mondistes, écologistes, marxistes…), qui se répartissent entre plus de 1500 organisations. Eddy Fougier distingue sept grandes catégories de mouvements :

o             des réseaux mondiaux (Forum social de Gênes, Forum social mondial, International Forum on Globalization, Mouvement international ATTAC qui compte environ 35 000 membres)

o             des organisations de masse (comme les organisations de défense des consommateurs)

o             des mouvements sociaux (mouvements paysans, comme le Mouvement des sans terre au Brésil, la Confédération paysanne ; l’Assemblée des pauvres en Thaïlande)

o             des groupes spécialisés dans la surveillance et l’évaluation de la mondialisation

o             des groupes spécialisés sur une question particulière (comme le Comité pour l’annulation de la dette du Tiers-Monde, en Belgique)

o             des ONG traditionnelles (Greenpeace, Amnesty International, Human Right Watch, Oxfam)

o             des groupes radicaux anticapitalistes prônant une action directe non violente (Armée zapatiste de libération nationale au Mexique)

Cette nouvelle forme de contestation se détache des stratégies syndicales traditionnelles. Elle forme une sorte de réseau, dans lequel les médias jouent un grand rôle. Ainsi, l’organisation ATTAC (« Association pour une taxation des transactions financières pour l’aide aux citoyens ») a été créée suite à un appel lancé par Ignacio Ramonet dans le Monde diplomatique. Elle a ensuite rassemblé des membres très divers, comme la confédération paysanne, le G10 solidaires ou le journal Charlie Hebdo.

 

Fond idéologique : une pluralité de préoccupations

Le terme « altermondialisation » (ou « altermondialisme ») a peu à peu remplacé le terme « antimondialisation », initialement utilisé par les journalistes. Cette modification sémantique semble illustrer une transformation dans la nature même du mouvement de contestation. Les altermondialistes ne s’opposent pas toujours radicalement au phénomène de mondialisation en tant que tel, et surtout ils s’efforcent de formuler des solutions, de proposer des alternatives. Ils souhaitent notamment faire prévaloir des valeurs telles que la démocratie, la protection de l’environnement et les droits humains. Ils critiquent la logique purement économique et réclament une mondialisation maîtrisée et solidaire.

Le mouvement contestataire se présente avant tout comme le porte-parole des « exclus ». Les transformations du capitalisme se sont accompagnées d’un accroissement important des inégalités et, plus généralement, d’une précarisation générale de l’emploi. Par ailleurs, les altermondialistes dénoncent également les inégalités politiques. Les citoyens n’ont que peu de prise sur les institutions régionales (Union Européenne) ou mondiales, ils ne peuvent guère participer aux processus décisionnels. De plus, les pays du Nord ont une voix prépondérante dans les grandes organisations multilatérales et les institutions financières, et les pays du Sud ne parviennent pas toujours à faire prévaloir leurs intérêts.

Enfin, le thème des préoccupations environnementales est très présent dans les mobilisations : ainsi, les altermondialistes condamnent les pratiques du transport maritime.

En outre, non seulement les mouvements contestataires défendent des objectifs très variés, mais ils adoptent également des modes d’actions différents. On peut notamment distinguer la tendance réformiste de la tendance radicale. Si la tentation de la radicalisation demeure forte (les actions violentes permettent généralement de bénéficier d’une importante couverture médiatique), de nombreux mouvements s’efforcent de changer le système de l’intérieur, en formulant des propositions. Enfin, on assiste souvent à une résurgence des logiques nationales ou régionales : l’action des ONG est souvent le reflet d’une vision du monde propre aux pays développés.

Limites de l’altermondialisme

Le mouvement, de par son hétérogénéité, manque de cohérence dans ses objectifs : les altermondialistes sont faibles parce que divisés, et en désaccord profond dès qu'il s'agit de décisions d'action concrètes. Par ailleurs, le discours des altermondialistes souffre parfois de contradictions : ainsi ils dénoncent les délocalisations (facteur de chômage dans les pays industrialisés) tout en prônant le soutien du développement des pays les plus pauvres.

Enfin, les groupes contestataires ne constituent pas réellement des porte-parole de l’opinion, et cette carence de légitimité leur est souvent reprochée. Certes, ils s’attirent souvent la sympathie d’une partie de l’opinion publique (l’idée de la taxe Tobin a ainsi reçu un accueil très positif). Mais ils ne se font en aucun cas l’écho d’une « société civile internationale ».

Pourtant, ces mouvements contestataires se font parfois porteurs d’alternatives sérieuses à la mondialisation libérale, et nombre des thèmes qu’ils défendent (question du développement, sort de l’Afrique, grands enjeux climatiques et écologiques) ont déjà été intégrés dans les approches internationales.

 

Bibliographie :

Pierre JACQUET, « la contestation de la mondialisation », in Economie Politique n°13, 2002/01-03

Eddy FOUGIER, « la mondialisation en question : contestation, mondialisation et inégalités » in Cahiers Français n°305

Problèmes politiques et sociaux n°897, 02/04

Une gouvernance mondiale est-elle possible ?

 

Introduction : La mondialisation est un rapprochement des êtres humains du fait du progrès sans précédent depuis le XIXème siècle des techniques de transport, d’échange et de communication. Mais si elle est un rapprochement économique, si elle permet aux individus d’échanger et de communiquer d’un bout à l’autre de la planète, elle ne parvient pas combler les lacunes dans la gestion collective des défis mondiaux. La constitution parallèle d’une société civile internationale a contribué à ce que ces question soient posées sur la place publique. En même temps, le triomphe de la démocratie dans les années 90 et la modernisation de celle-ci dans les pays occidentaux, ont imposé de mieux légitimer les processus décisionnels. Ce sont donc les deux idées de concertation et de légitimation de la décision qui s’associent dans celle de gouvernance.

 

            La gouvernance est un concept originellement anglo-saxon, governance, utilisé dans le langage diplomatique et académique depuis une vingtaine d’année. La décentralisation marchande des décisions se substituait à la centralisation de la diplomatie traditionnelle, du fait du progrès des technologies d’échanges et de transports de biens, de capitaux et d’information. Il fallait un concept qui traduise cette démocratisation de la prise de décision. Il désigne originairement l’idée que pour être suffisamment légitime, toute décision doit reposer sur une concertation préalable entre acteurs concernés. Celle-ci peut être horizontale (négociations inter-étatiques au sien d’institutions internationales, communautés urbaines, etc…) ou verticale, on parlera alors de « multilevel governance ». Peu clair dans son acception concrète, la gouvernance peut prendre diverses formes (comitologie, travail des ONG, concertation entre institutions européennes, étatiques, régionales, municipales) et s’appliquer à tout domaine entrant dans le champ des politiques publiques. Aujourd’hui et plus généralement, le concept de gouvernance mondiale permet de symboliser l’action diplomatique internationale, et de faire dire aux acteurs qu’ils agissent dans ce cadre démocratisé, pourtant flou et peu clair. On notera également le caractère politiquement correct de ce terme qui désigne une généralité sans visage. On peut se demander si ce terme ne permet pas simplement d’éviter d’utiliser le mot gouverner, trop autoritaire. En matière internationale, on pourrait aisément lui substituer des concepts généraux comme « concert des Nations », « relations internationales » ou « gestion collective des affaires internationales ». C’est dire à quel point c’est une notion fourre-tout. Elle s’impose pourtant dans le langage commun et sert d’illustration aux aspirations éclatées de toutes les organisations agissant sur la scène internationale. En Europe, l’expression de bonne gouvernance remplit un rôle de légitimation des procédures utilisées dans un processus décisionnel (voir sur ce point le Livre blanc de la Commission européenne sur la bonne gouvernance et Governing Europe de J.Sharpf). Dire gouvernance, ce n’est pas dire le niveau démocratique de cette gouvernance, qui est très variable. Entre les discussions diplomatiques et les délibérations de conseils de quartiers, il y a mille et une procédures intermédiaires, de transparence variable. Enfin, dire gouvernance ne dit pas le niveau opératoire de cette gouvernance. Le gouvernance mondiale existe, certes, mais elle n’en reste pas moins conditionnée et limitée par d’autres facteurs, comme celui, traditionnel, de la puissance, qui organise finalement cette gouvernance.

 

Malgré l’utilisation récurrente de cette notion dans l’espace mondial, nombreux sont les spécialistes de sciences humaines qui se font les portes-parole respectables d’un malaise répandu dans la population mondiale relatif à l’absence de gouvernance efficace et démocratique au niveau international. Dans Un monde privé de sens, Zaki Laïdi trace les contours du tableau anarchique et éclaté du concert mondial des Nation ; de même Joseph Stiglitz déplore dans Globalization and its discontents l’inefficacité des recommandations des institutions économiques internationales (FMI, OMC, Banque Mondiale) d’une part, et la coupure qui existe entre les principes guidant leurs actions et les besoins réels des populations concernées signe de l’absence d’une gouvernance multi-niveaux effective. L’absence de coordination des acteurs de la scène internationale, l’absence de perspectives commune ou d’unité de représentation entre les Nations suscite en permanence le débat sur la nécessité de mettre en place une gouvernance mondiale, pour gérer collectivement les défis qui, eux, concerne la planète de façon uniforme. Dans Le requin et la mouette, Dominique de Villepin dresse la liste de ces défis : écologiques, sécuritaires, religieux, scientifiques. Qu’il s’agisse du réchauffement de la planète ou de la recherche en matière énergétique (fusion nucléaire), les externalités ne connaissent pas de frontières et appellent une actions de lutte ou de promotion concertées et effectives.

 

Quelle est l’effectivité du concept de gouvernance mondial ?

 

 

I.                   Un concept qui légitime des négociations plus ouvertes

 

Pour légitimer leurs décisions, les Institutions de l’ONU consultent préalablement un certain nombre d’acteurs, telles que les Institutions spécialisées de l’ONU, des experts, et naturellement, des ONG. Originellement, le débat sur la gouvernance mondiale s’est centré autour de la question des inégalités entre l’occident et le Tiers-Monde. Le concept de gouvernance permet de désigner une coordination entre tous les acteurs (économiques, politiques, associatifs, académique, citoyens) concernés par un problème donné, dans leur diversité. Tout type de négociation multilatéral peut entrer dans cette acception. Le PNUD (lancé en 1964) est une illustration de ce que peuvent être des structures de gouvernance en matière de développement. Des acteurs tels que les Etats, la BERD, ou des organismes de micro-crédit se réunissent pour mettre en place une action concertée d’aide au développement dans telle ou telle partie du monde. Ce sont tant des acteurs locaux qu’internationaux ou nationaux qui sont consultés.

            Nombre d’organisations font utilisation de ce terme pour légitimer leur consultation dans telle ou telle décision. Des milliers d’ONG (humanitaires, religieuses, politiques, syndicales) sont représentées dans les institutions internationales ; certes, elles peuvent apporter leur voies et leur lobbying lors des grands débats internationaux. Mais elles restent soumises aux volontés des Etats, et surtout, bien souvent, à leur financement. Au niveau européen, les concertations avec les ONG permettent bien souvent d’éviter des problèmes en amont, et d’éviter des soubresauts sur le terrain. Au niveau mondial l’effectivité des consultations des ONG est plus erratique, mais permettent parfois de soulever des questions qui resteraient autrement en suspend. Les groupes comme ATTAC appellent également la constitution d’une gouvernance mondiale, entendue sous une acception économique et sociale. La négociation sur la taxe Tobin imposerait une concertation approfondie des acteurs et de tous les Etats. Sa mise en place imposerait également une procédure de gouvernance en continu dans sa gestion. Sa non mise en place jusqu’à présent montre les difficultés de mettre tous les Etats d’accord sur un point économique, aussi faible soit-il (0,1% des transactions mondiales).

            En matière écologique, seule une bonne articulation entre l’action concertée au niveau mondial et l’application concrète sur le terrain peut avoir un impact significatif. Le slogan « penser global, agir local » illustre cette gouvernance multi-niveaux. Le défi environnemental ne connaît pas de frontières, et concerne l’humanité dans son ensemble. Les sommets de Rio en 1992, Kyoto en 1997 ou Johannesburg en 2003, se sont succédés, sans pour autant répondre effectivement à la menace, signe de la difficulté de donner à cette gouvernance une portée pratique.

 

II.                l’expérience relativement réussie de la gouvernance européenne

 

Le cas européen est illustratif de la tentative de rendre plus transparente, plus démocratique la prise de décision, dans ledit cadre de bonne gouvernance. Né au départ pour répondre au « déficit démocratique » de l’Union européenne, le débat sur la gouvernance a permis de proposer à la marge, quelques solutions permettant de donner voie au chapitre aux organisations concernées par un problème posé. C’est ainsi que la comitologie communautaire ouvre des forums consacrés aux questions en cours. C’est ainsi, également, que la commission Stasi a dû, dans l’élaboration de ses propositions, consulter à la fois les organisations concernées, mais aussi des représentants des institutions européennes. C’est ainsi, enfin, que les différentes directions générales de la commission consultent des organismes représentatifs de la société civile avant de soumettre ses propositions au collège des commissaires. On ne peut pas dire pour autant que l’objectif de transparence et de démocratisation de l’Union européenne soit achevé. On ne peut que constater que des efforts sont faits dans la mesure du possible pour élargir les débats, avant de prendre des décisions. Le débat sur la gouvernance économique européenne est similaire. Utiliser le mot gouvernance désigne certes une coordination entre les acteurs économiques de la zone euro, mais ne signifie pas que ce mode de gouvernement économique sera démocratique. L’indépendance de la BCE, et ses mandats, ne découlent pas de principes démocratiques mais d’une nécessité d’expertise.

On remarquera l’importance du droit dans la matérialisation effective des procédure dites de « gouvernance » au niveau européen. Le droit se substitue progressivement à la puissance dans l’Union européenne. Il y a bien échange des libertés des Etats (ici de souveraineté) contre la sécurité, sous le sceau de la Loi européenne (ainsi nommé dans le projet de traité constitutionnel). Les droits communautaire et européen s’imposant aux Etats et à leurs assujettis, ils gagnent progressivement, jurisprudence après jurisprudence, leur valeur effective. Ils permettent ainsi de donner une portée opérationnelle à la gouvernance, qui donne pour sa part une valeur ajoutée réelle à la décision.

Ce qui est relativement possible dans le cadre européen ne l’est pas de la même manière au niveau mondial, où d’une part les Institutions internationales n’ont pas les moyens autonomes de faire appliquer leur décisions, et d’autre part parce que l’effectivité du droit international public est conditionné d’une part à la volonté des Etats de l’appliquer, ce qu’ils font de manière variable, et d’autre part une homogénéité inexistante des normes entre les Etats. Il n’empêche que le modèle européen de gouvernance peut servir de base à la gouvernance mondiale, dans sa capacité à susciter le consentement des Etats à substituer des rapports de droit à leur ancien rapport de puissance.

III.             Un concept faiblement opérant au niveau mondial

 

Au niveau mondial, la gouvernance reste déterminée par les rapport de puissance. Le droit n’en est que l’émanation – voire la fixation des rapports de puissance - comme en témoigne l’inégalité radicale qui existe dans les procédures de décision entre les pays du Conseil de sécurité et ceux de l’Assemblée Générale de l’ONU. Mais là encore,

La faiblesse relative des Institutions internationales, de l’ONU en particulier donnerait raison aux thèses récusant l’existence d’une gouvernance mondiale. La non-ratification des accords de Kyoto, de même que l’inaction des Etats face à la situation dramatique au Darfour illustrent les difficultés de mouvoir ensemble de bloc des Nations. De même le débat récurrent au Etats-Unis, premier Etat donateur, sur la légitimité de l’ONU montre que la gouvernance mondiale actuelle pâtit d’un important déficit de légitimité. Enfin, l’absence matérielle d’effectivité des décisions de l’ONU, comme le montre la non application de ses résolutions par Israël, est le dernier élément qui rend idéaliste à moyen terme l’utilisation du concept de gouvernance mondiale.

La faible effectivité du droit international s’ajoute à ce tableau des limites de l’action concertée au niveau mondial et montre par dérivation la difficulté de mettre en place une gouvernance mondiale effective. Unificateur par nature, le droit pourrait constituer une structure d’harmonisation de la gouvernance mondiale. A maints égard, de nombreuses expériences, telle la construction européenne, prouve que c’est déjà le cas. Mais le droit reste un substitut à la puissance, quand il n’en est pas un moyen. La loi américaine de 2001 immunisant tout citoyen américain contre une décision de la nouvelle CIJ le concernant prouve cet état de fait. Finalement, le fait d’utiliser des concepts nouveaux ne change en rien la structure des relations internationales. L’utilisation des institutions internationales aurait dû être un préalable à la décision américaine d’envahir l’Irak. Mais l’on a bien vu, le facteur de puissance permet à la première démocratie du monde de contourner cette bonne gouvernance, en dernier ressort.

La puissance reste l’élément central de cette gouvernance actuelle. Et même si cette puissance parviendra à mieux se légitimer en utilisant les procédures de « bonne » gouvernance, il est à craindre que les déficits de gouvernance que pointe Stiglitz dans son ouvrage persistent. Le cas des décisions du FMI, dans certains pays tels que le Mexique en 1994, la Russie en 1995 ou la Thaïlande en 1997 montre que la gouvernance multi-niveaux au niveau mondial, est erratique. Stiglitz montre comment des décisions découlant du consensus de Washington furent plaqués sur des économies dont les besoins étaient différents, et spécifiques. Ils eurent des conséquences souvent dramatiques, à court terme sur ces pays, simplement parce qu’ils avaient pour effet de mettre sur la place publique leur situation déjà difficile, déclenchant des anticipations négatives à leur égard. La rigidité de ces décisions d’autre part montrait l’absence d’une volonté de concertation ; cela n’empêche pas les professionnels du FMI de parler de gouvernance pour désigner leur gestion.

            Si, donc, la gouvernance montre en Europe une utilité dans la légitimation et la démocratisation de la prise de décision, elle reste très incertaine au niveau mondial. Si elle existe, elle n’est qu’un concept sans valeur opérationnelle. Elle reste déterminée par les rapports de puissance, et ne pourra exister que lorsque les décisions des institutions internationales et celle des juridictions internationales auront une force exécutoire. La gouvernance mondiale est enfin centrée autour des ordres du jour de la puissance dominante, qui peut contourner les procédures de gouvernance. Elle existe donc, mais elle ne sous-entend pas de caractère positif, démocratique ou novateur à ce qu’était déjà le concert des relations internationales. Quand à la question de la possibilité d’une gouvernance mondiale démocratique elle reste suspendue à l’effectivité du droit international, à sa démocratisation, et à la mise à disposition de moyens de puissance publique à l’autorité de gouvernance, l’ONU.


Les enceintes monétaires et financières internationales

 

 

Création

Statut, critiques

Membres

Prise de décision

Principales missions

Pouvoirs

 

       Les Institutions

 

 

de Bretton

 

Woods

 

 

 

 

FMI

1944

Organisation internationale, critiquée pour ses positions libérales et les effets néfastes que ses exigences peuvent avoir dans les PED.

183

« démocratie censitaire »

Le pouvoir de vote est pondéré selon la participation financière de chaque Etat au budget de l’institution.

Quotes-parts :

Etats-Unis : 18,3 %

Japon, All. : 5,7 %

France, RU: 5,1%

 

·        code de bonne conduite dans la politique monétaire

·        caisse de solidarité (Compte des ressources générales) alimentée par les Etats membres en fonction de leurs quotes-parts, pour aider les pays en déficit. Vient au secours des Etats en crise, impose en retour de cette aide des réformes structurelles.

·        Promotion d’un régime de changes stable

Pouvoir de demander toute information utile aux Etats membres, pouvoir de sanction.

Afin de stabiliser les taux de change, le FMI a créé de toutes pièces une monnaie, le DTS (droit de tirage spécial). C'est une unité de compte utilisée par le FMI pour évaluer ses opérations, calculée à partir des 5 devises les plus utilisées dans le monde pour les échanges internationaux.

Banque internationale de reconstruction et de développement

(Banque mondiale)

1944

Organisation internationale, sujette aux mêmes critiques que le FMI, mais qui y a prêté plus d'attention, et a commencé à revoir sa politique dans une optique plus sociale.

Il faut être membre du FMI pour pouvoir adhérer à la BIRD.

Idem

·      reconstruction après guerre. Mission peu remplie, car Plan Marshall.

·      Mobiliser l’épargne privée en faveur des projets de développement.

 

 

 

Société financière internationale

1956, émanation de la BIRD

Organisation internationale, indépendante de la BIRD

 

 

Favorise les investissements privés dans les PED, sans exiger la garantie financière des Etats où ces projets se réalisent.

 

Association internationale de développement

1960, émanation de la BIRD

Organisation dépendant juridiquement de la BIRD

 

 

Fournit une aide financière aux pays les plus démunis, sous des conditions beaucoup plus favorables que la BIRD.

 

Agence multilatérale de garantie des investissements

1988 ; émanation de la BIRD

Organisation internationale indépendante

 

 

 

Encourager les investissements directs étrangers dans les PED

 

 

 Autres OI          

 

 

 

 

 

 

 

 

 

OCDE

1961 (succède à l’OECE, créée en 1945)

Organisation internationale

30

 

Vise à promouvoir la croissance en Europe. Coordonne les politiques publiques des Etats européens.

Organisme de lutte contre le blanchiment : le GAFI 

Lutte contre les paradis fiscaux

Peut adopter des recommandations, voire des sanctions

Banque des Règlements internationaux

1930 (traité sous l’égide de la SDN)

Banque de droit privé

Les actionnaires sont les banques centrales des Etats signataires du traité

 

 

Forum de coopération monétaire et financière entre les banques centrales.

Centre de recherche.

 

 

Groupes informels

 

 

 

 

 

 

 

G7 / G8

1975

Aucun statut juridique, rencontres informelles. X
Sommets critiqués par les altermondialistes, qui leur reprochent une vision trop libérale de l'économie internationale.

7 pays les plus industrialisés

États-Unis, Japon, Allemagne, France, Italie, Royaume-uni, Canada

G8 : + Russie

Diplomatique

depuis 1984 : réunions des ministres des Affaires étrangères des États membres, et, depuis 1986, des ministres des Finances et des représentants du FMI.

Forum informel de discussion de tous les sujets d’économie internationale.

 

Forum de stabilité financière

1999

Idem

Présidé par directeur BRI, ministres de l’Economie du G7, diverses OI

 

Coordination des initiatives diverses visant à consolider le système financier international                                                                                                                                                                                                                      

 

Groupe des 10

1962

 

G7 + Suisse, Suède, Belgique, Pays-Bas, (ce qui fait 11 !)

 

Initialement : pays disposés à fournir des fonds supplémentaires au FMI.

Evolution vers un forum de discussion des politiques monétaires.

 

Groupe des 24

 

 

Antenne du Groupe des 77 PED

 

Prépare la position des PED lors des réunions du FMI.

Questions financières liées au développement.

 

 

 

 

 

 

Bibliographie : Jean-Paul Gaudin, Pourquoi la gouvernance, PSP, 2002

                        Zaki Laïdi, Un monde privé de sens, Fayard, 2001

                        Joseph Stiglitz, La grande désillusion, Fayard, 2002

                        Combacau, Sur, Droit International Public, 6ème ed, 2004

                      Serge Sur, Relations internationales

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